Les réflexions lumineuses d'Émilie Lemardeley

Les réflexions lumineuses d'Émilie Lemardeley

Qu’il passe par une « réflexion » sur la lumière, et son goût pour le verre en tant que matériau de prédilection, ou par son attirance par les défis d’équilibre techniques, l’entraînant à collaborer pour ses pièces avec de nombreux artisans, le travail de la designer Émilie Lemardeley questionne autant la maîtrise de la forme que la nuance des couleurs.


Zeus, Helios, Dionysos, Narcisse, les pièces de la designer Émilie Lemardeley, qu’il s’agisse de mobiliers (sofa, fauteuil, banc), de miroirs ou encore de luminaires (sur pied, en applique ou en suspension), tirent leur nom d’une attirance pour la mythologie grecque induisant autant son regard sur la forme que sur le monde. « J’aime la mythologie grecque pour l’avoir longtemps étudiée », avance-t-elle. « Elle m’a ouvert à un autre monde, qui n’est pas le monde rationnel dans lequel nous vivons aujourd’hui. À travers ses pièces, Émilie Lemardeley cherche surtout à ouvrir la porte sur son monde. Un monde tourné sur le singulier, la courbe et l’intuition, qui semble bien coller avec son parcours atypique, l’ayant vu aller de Sciences-Po à l’Ecole du Louvre, passer de l’Ecole Sotheby’s de Londres au département Mobilier du 20ème siècle de Christie’s, avant qu’elle n’achève sa formation à l’Ensaama olivier de Serres, puis ouvre son propre studio en 2012.

Parques ribon lighting fixture

La clef de ses créations se situe pour beaucoup dans sa grande recherche d’équilibre et de précision. « Le défi du lustre ruban Parques a été de trouver un bon équilibre des points de suspension afin que le ruban se développe avec la forme souhaitée, sans multiplier les points d’accroche », admet-elle ainsi.

« Idem pour les lustres Dionysos. On peut décliner les formes à l’infini tant que l’on fait attention au poids des verreries et à la longueur des ʺbranchesʺ en métal. »

Dionysos lighting fixture
Dionysos lighting fixture

Son choix des matériaux est aussi essentiel, et son travail révèle notamment son goût pour le verre, que l’on retrouve dans ses miroirs et luminaires. « J’utilise le verre car il est vecteur et récepteur de lumière, ce qui est à la base de mon travail. La dimension philosophique de la lumière me permet d’ouvrir sur la ʺréflexionʺ, qui est à la fois la réverbération d’ondes lumineuses sur une surface, le reflet, mais aussi l’activité cérébrale. Le verre qui permet de jouer avec les ʺréflexions lumineusesʺ est donc mon matériau de prédilection. » De fait, Émilie Lemardeley commence toujours par détailler la lumière du lieu lorsqu’elle réalise des installations lumineuses. « Cela me permet de savoir si le verre sera mieux transparent ou opalescent, coloré ou sablé blanc. Le verre est un matériau captivant qui peut se travailler de différentes façons (soufflé, coulé, moulé, taillé). Il devient presque matière vivante, quand on y ajoute la lumière. »

Outre la lumière, son travail du verre fait aussi la part belle à la couleur. Elle y décline ainsi son attirance pour la « chaleur » que doit dégager un objet. « Selon moi, un intérieur minimaliste, trop épuré en couleurs, manque de souffle », souligne-t-elle. « Il faut que les couleurs se mêlent et se répondent, que les objets s’appellent et s’interpellent pour donner du sens, donner du cœur à l’espace.  Un objet n’est pas seulement une fonction, c’est un petit réceptacle d’âme. »

Savoir-faire français et projets d’ampleur sur mesure

Pour perfectionner les formes de ses créations, Émilie Lemardeley aime travailler avec des artisans, souffleurs de verre ou ferronniers d’art. Cela a notamment été le cas pour l’une de ses plus récentes créations, le grand sofa Zeus.

Zeus Sofa

« Le grand sofa Zeus est une aile d’oiseau qui nous a demandé beaucoup de prototypes et de minutie entre les différentes couches de mousse afin d’allier dessin et confort d’assise », explique-t-elle.

« Il y a des défis techniques dans chaque objet et pour les réussir, il faut que je puisse être proche des ateliers. C’est pourquoi tout est fabriqué en France. Les artisans français ont un savoir-faire et une maîtrise de leur art très aboutie. »

Pour la majeure partie de son travail contenant du métal, elle collabore avec le même atelier depuis neuf ans. Ce dernier l’a beaucoup aidé pour la réalisation de sa sculpture Proue, créée pour le nouveau quartier du Panorama dans la ville de Clamart. « C’était un vrai challenge par son ampleur (huit mètres de long par six mètres de haut) et par son poids, six tonnes », se félicite-t-elle. « En plus, je voulais que la pièce soit suspendue au-dessus d’un bassin d’eau. Je me suis donc entourée d’un bureau d’études techniques pour la réalisation. Les 1500 pièces ont été dessinées au millimètre avant d’être assemblées sur une matrice géante. »

Artistic installation for ZAC du Panorama, Clamart (92)
Artistic installation for ZAC du Panorama, Clamart (92)

Représentée en France par la galerie Avant-Scène, et par les galeries Gardeshop à Los Angeles et Cuturi Galerie à Singapour, Émilie Lemardeley dessine et réalise beaucoup de pièces pour l’étranger, en particulier pour des décorateurs et architectes. Des décorateurs d’intérieurs et architectes qui sont en général ses premiers clients, venant la voir pour réaliser un objet unique pour leur projet. « On peut aussi partir d’un objet de mes collections qu’ils ont apprécié pour l’adapter à leur projet. Mais c’est toujours une création unique, adaptée pour le lieu où elle prend place », précise-t-elle.

« Je travaille avec une quarantaine de couleurs de verre, et au sein de ces couleurs, on peut également jouer sur la densité et donc créer à nouveau des nuances pour faire des camaïeux. De même pour le métal, j’aime jouer avec les patines ou les feuilles d’or dont il existe une vingtaine de teintes différentes. Cette vaste palette me permet de réaliser des installations lumineuses sur mesure pour de grands espaces, comme des salles de restaurant, des halls d’entrée d’hôtels, des cages d’escaliers. Ma dernière réalisation pour le groupe Eiffage Immobilier habillait un hall d’immeuble et atteignait huit mètres de hauteur. »

Eiffage Immobilier, hall d'entrée de la résidence Dédicace dans le 14e arrondissement de Paris - Lustre Dionysos en verre soufflé


Rédigé par 
Laurent Catala

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3/10/2025
USM x Leica : quand le mobilier rencontre le home cinéma

USM et Leica dévoilent une nouvelle collection de meubles multimédia qui allie design modulable et technologie de pointe. Conçue pour le bureau comme pour le salon, elle intègre le projecteur Leica Cine 1 et un écran motorisé, offrant une expérience à la fois professionnelle et cinématographique dans un même espace.

Après une première collaboration en 2024, USM et Leica présentent une nouvelle collection de meubles pensés pour accueillir le projecteur Leica Cine 1. Une rencontre entre le design modulable du fabricant suisse et l’excellence technologique de la marque allemande, pour un usage professionnel et personnel.

Une solution modulable adaptée à tous les environnements

Imaginée pour s'adapter au  bureau comme dans le salon, la collection USM Leica Cine se décline en quatre buffets modulables intégrant le projecteur et un écran motorisé de 100 ou 120 pouces. Dans un environnement de travail, le dispositif se montre pratique et organisé puisque les câbles et prises électriques sont dissimulés et offre une performance visuelle optimale grâce à la résolution 4K et à la technologie laser triple RGB, idéale pour tout type de réunion. Dans l’espace domestique, le meuble se transforme en véritable hub de divertissement : l’écran se rétracte discrètement pour restituer l’esthétique du salon, tandis que le Cine 1 diffuse des images lumineuses et immersives. Une même solution qui conjugue esthétique, modularité et technologie de pointe, au service de la clarté professionnelle comme de l’expérience cinéma.

© USM

Leica Cine 1 : un projecteur compact et immersif

Compact et raffiné, le Leica Cine 1 vient sublimer l’ensemble de la solution grâce à sa qualité d’image optimale, l’intégration de technologies et de fonctions connectées de télévision intelligente, le tout complété par un son surround Dolby Atmos®. Fidèle à l’ADN de Leica, ce projecteur incarne la vision d’un home cinéma élégant et hautement immersif.

© USM

La collection USM Leica Cine est disponible en 14 coloris, pour toujours plus de possibilité de personnalisation au sein des espaces dans lesquels elle prendra place et propose ainsi une alliance où design et innovation ne font plus qu’un.

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3/10/2025
EspritContract : Chez Ligne Roset, le sur-mesure au service de l’architecture

Pour sa troisième édition, EspritContract se tiendra du 15 au 18 novembre au Parc des Expositions de la Porte de Versailles. Plus d’informations sur : https://www.espritmeuble.com/le-salon/secteurs/secteur-contract.htm

Forte de son histoire, Ligne Roset se positionne aujourd’hui comme partenaire et fabricant spécialiste du sur-mesure.

Le confinement de 2020 avait profité au marché de l’architecture intérieure. C’est désormais à celui de l'hôtellerie que souri 2025. Un segment en forte croissance, porté par « la multiplication des ouvertures d’établissements, soutenues notamment par de grands groupes comme Accor ou Hilton », comme le souligne Max Flageolet, directeur de la branche contract chez Ligne Roset. Une activité qui représente entre 10 et 15 % du chiffre d’affaires global de l’entreprise. Une progression soutenue par cette conjoncture, mais aussi par l’émergence de nouveaux marchés, comme l’hôtellerie de plein air, avec d’importants « projets de rénovation de bungalows, ou encore le secteur naval, qui représente désormais près de 20 % des projets contract ». Un univers développé depuis une dizaine d’années en partenariat avec les Chantiers de l’Atlantique ou la compagnie Ponant. Mais ce dynamisme repose aussi sur son organisation. Implantée dans l’Ain, l’entreprise dispose d’un site de production de 150 000 m², où une équipe contract d’une trentaine de personnes répond aux projets dont 90 % sont aujourd’hui réalisés sur mesure.

Light House les Prairies de la Mer Saint-Tropez. Architecture intérieure : Briand & Berthereau. ©Yann Audic

Un retour aux sources

Si le contract rime depuis quelques années avec une diversification des perspectives et du marché, c’est un petit peu différent chez Ligne Roset. « C’est par là que nous avons commencé, dès les années 30 », résume Max Flageolet. Après la Seconde Guerre mondiale, l’entreprise se spécialise dans le mobilier pour collectivités : résidences étudiantes, maisons de retraite, équipements publics. Une activité mise en pause dans les années 70, avant d’être relancée dans les années 90, à l’aube d’un tournant dans l’univers de l’hôtellerie. « Le contract est réapparu en même temps que le regain des hôtels pour le mobilier design. Ça a notamment donné naissance aux boutiques hôtels, à l’image de l’hôtel Morgans de New-York, dessiné par Andrée Putman. », raconte-t-il. Un renouveau qui répond alors à une demande de différenciation. Mais rapidement, il devient clair que le standard ne suffit plus. « Il a fallu repenser les assises pour les adapter aux normes incendies, à l’usure, et tout simplement à un usage plus intensif. » Ligne Roset prend alors un autre virage parallèle : celui du sur-mesure.

Intercontinental Lyon - Hotel Dieu. Architecte d’intérieur : Jean Philippe Nuel. ©Nicolas Matheus

La collaboration comme ADN

Avec le lancement en début d’année de son podcast « Espèce d’Espace », Ligne Roset souhaitait réaffirmer sa posture de partenaire de projet, et non de simple fournisseur. Réputée pour ses collaborations grand public avec Lelièvre, Vitra ou encore Sebastian Herkner, la marque se place également comme un partenaire de dialogue lors des projets contract. « Ce sens de la collaboration est fondamental. Nous l’avons vécu récemment, lors de la rénovation du Mandarin Oriental de Zurich, avec Tristan Auer, en 2023. Au-delà de le fabrication du beau, notre rôle est aussi de penser la durabilité de l’objet, que ce soit en poussant vers des assises de nouveaux déhoussables, ou du mobilier sans colle. » Une démarche qui passe par la discussion, mais également une analyse de cycle de vie et une notation éco-impact intégrée dès la conception. « L’hôtellerie a énormément évolué. À une époque, je disais que le vrai luxe dans une chambre d’hôtel, c’était l’espace. Aujourd’hui, c’est presque l’inverse. C’est devenu très décoratif, avec une multitude d’éléments ajoutés. Nous devons nous adapter, bien sûr, mais aussi garder une place pour questionner, proposer, initier de nouvelles réflexions. »

Mandarin Oriental Savoy Zürich. Architecte d’intérieur : Tristan Auer. ©Amaury Laparra
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1/10/2025
EspritContract est de retour à Paris du 15 au 18 novembre !

Du 15 au 18 novembre 2025, EspritContract transformera la Porte de Versailles en véritable laboratoire d’inspiration pour les prescripteurs et professionnels du design. Mobilier, matériaux innovants, tendances émergentes et rencontres sur mesure, voici les grandes lignes de cette troisième édition.

EspritContract revient s’installer au cœur du salon EspritMeuble avec une énergie renouvelée et un objectif clair : offrir aux architectes, décorateurs, promoteurs, groupes hôteliers et acheteurs FF&E et AMO une expérience unique où inspiration rime avec concrétisation. Avec plus de 400 marques exposantes et 14 000 visiteurs professionnels attendus (12 500 en 2024), dont 2 500 prescripteurs, le salon crée en 2023 s’impose comme le rendez-vous incontournable pour découvrir les savoir-faire d’excellence et les solutions sur mesure qui façonnent l’ameublement et l’aménagement de demain.

Une nouveauté majeure pour l’édition 2025

Pour sa troisième édition, le salon innove cette année avec une nouveauté : les visites personnalisées. Un dispositif sur mesure permettant à certains cabinets et groupes hôteliers de bénéficier d’un parcours guidé par un expert, ciblant les exposants les plus pertinents pour leurs projets. Une formule pensée pour maximiser le temps, les rencontres qualifiées et la découverte de solutions adaptées.

De nombreuses nouvelles marques et une ouverture à l’international

Cette nouvelle tenue d’EspritContract sera l’occasion d’exposer de nouvelles marques emblématiques telles que Ligne Roset Contract, Flos ou Vitra pour ne citer qu’elles. Le salon mettra également à l’honneur « MADE IN PORTUGAL Naturally » une exposition de 150 m² qui présentera une cinquantaine de marques de mobilier, literie, textile et décoration dans le but de révéler la créativité, la qualité et le savoir-faire d’exception du Portugal. Une initiative soutenue par APIMA, l’AICEP et co-financée par l’Union européenne.

Un programme de conférences inspirant

Pour chaque édition, le salon propose en parallèle des exposants une série de conférences, tables rondes et talks inspirants afin de permettre aux visiteurs de découvrir tendances, innovations et bonnes pratiques en matière de durabilité, ergonomie, upcycling, design extérieur ou transformation des lieux de vie et de travail. L’occasion d’en savoir davantage sur l’évolution et les enjeux actuels du secteurs et de de rencontrer des grands noms et jeunes talents qui font le design et l’architecture d’aujourd’hui. Le programme complet sera dévoilé prochainement sur le site du salon.

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29/9/2025
leLad Éditions : design brut, usages sensibles

Fondée en 2023 par Esther Guyon et Guillaume Terver, leLad Éditions propose des pièces au caractère brut, pensées pour faire dialoguer la fonction et la matière.

Situé à quelques kilomètres de Saint-Malo, l’Atelier leLad Éditions, installé dans un bâtiment au toit de chaume semi-ouvert, s’intègre parfaitement dans le paysage breton dans lequel il prend place. Sous l’impulsion de Guillaume Terver et d’Esther Guyon, architectes d’intérieur et designers de formation, leLad Éditions - dont le nom est tiré de LeLad (Laboratoire en Architecture & Design), agence fondée en 2007 par Guillaume Terver et dédiée à l’architecture et au design - s’impose comme une continuité de leur démarche, adaptée cette fois à l’échelle du mobilier et de l’objet.

 Bureau Jule et chaise Jouan © leLad Editions

Faire sens entre fonction et usage

« Nous essayons de développer des pièces qui peuvent être interprétées de plusieurs manières », confient les cofondateurs. Leur volonté : proposer des créations polyvalentes, capables de s’intégrer dans différents espaces, tout en résonnant avec des projets d’architecture, mais pas uniquement. Tous deux accordent en effet une grande importance à l’usage et à la fonction de l’objet, autant qu’aux matériaux. « L’ergonomie est fondamentale. Si ce n’est que beau, ça n’a pas d’intérêt. Il faut qu’il y ait une puissance qui se dégage de la pièce », complète Guillaume Terver.

Tabourets Charlotte © leLad Editions

L’importance du choix des matériaux

Concernant les matériaux, toutes les pièces sont réalisées en bois massif, par un artisan installé à Dinan comme c’est le cas de la console Pesa, de la chaise Jouan ou encore du bureau Jule. « Le choix du bois massif et la manière dont nous allons le travailler sont essentiels dans notre démarche, car ils renvoient à notre rapport au corps et à la matière, deux dimensions fondamentales pour nous », explique Esther Guyon. Ils explorent également la pierre, avec la table basse Vile, ou encore le travertin, pour la table Far, toute en brutalité. Leur catalogue, qui s’étoffe peu à peu, compte aussi bibliothèques, canapés, luminaires, tables de chevet, bureaux et enfilades, autant de pièces au caractère unique. Un travail des matières primordial pour le duo, qui cherche à atteindre un équilibre entre fonction et ergonomie, appuyé par des choix exigeants en termes de matériaux et de formes. De cette recherche naissent ainsi des collections en petites séries et produites en circuit court.

Table Far © leLad Editions

Continuer à se développer

Aujourd’hui composée d’une dizaine de personnes, leLad Éditions cherche à développer de nouvelles pièces aux côtés de ses artisans, tout en poursuivant son exploration des matières. En septembre, la maison d’édition a dévoilé une nouveauté : le bout de canapé Charlotte H, en frêne massif et doté d’un plateau en marbre Arabescatto. Côté événements, leLad Éditions participait en avril dernier à Art Paris, dans le cadre de sa nouvelle section dédiée au design. Fin octobre, la maison est attendue à Knokke, en Belgique, dans le cadre du salon SavoirFaire.

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