Le design booste le "Made in Portugal"
Mobilier Paulo Antunes

Le design booste le "Made in Portugal"

Au Portugal,  sous l’impulsion de designers et directeurs artistiques, les éditeurs  s’appuient sur les nouvelles technologies pour faire évoluer une fabrication très inscrite dans des savoir-faire traditionnels. Une façon de promouvoir un nouveau  positionnement sur le marché entre création industrielle, artisanat, voire pièces « collectible ».


Après deux événements majeurs en juin à la Portugal Home Week à Porto et à la Paris Design Week, le design portugais se fraie un chemin qui met en lumière toutes les facettes de son talent et de ses savoir-faire artisanaux. Forts de cet ancrage territorial, les créations de mobilier, de textile ou de céramique, liées à une fabrication traditionnelle, se rattachent aux ateliers centenaires et fabricants d’ameublement (plus de 200). Souvent fondés par une même famille, ils ont évolué avec les nouvelles technologies, cherchant à promouvoir une nouvelle notoriété.

Artisanat, art design ou ameublement ?

L’exposition « Métamorphose » à la Paris Design Week, dans le cadre de Made in Portugal naturally, soutenue par l’AICEP, a souligné l’unicité du design portugais, au-delà du cliché connoté d’un pays fabriquant pour des distributeurs d’ameublement en Europe. Mettre en évidence le croisement et la diversité des techniques artisanales, tel a été le synopsis de ce parcours, au cœur du quartier du Marais, mis en scène par le designer franco-portugais Christophe de Sousa. L’approche particulière du procédé de fabrication d’un objet au Portugal (du prototype à la série), confirme l’identité d’un pays qui chercher à sauvegarder ses valeurs traditionnelles tout en ayant la volonté d’intégrer une dimension internationale.

Chaise Miguel Soeiro, table Metamor, lampe Vista Alegre, Vase Maria João Baia, table OIA et chaise Property furniture, design Christophe de Sousa
Carrelage peint à la main, Viuva Lamego, vase Vicara, bougie Manuela

Au Portugal, des entreprises qui s’ouvrent au design

Sous l’impulsion de designers et directeurs artistiques, certains fabricants ajoutent à leur activité des pièces plus haut de gamme, très abouties dans les finitions. Ils mettent leurs expériences des savoir-faire en matière d’ébénisterie, vannerie, céramique, au service des créatifs, ce qui n’était pas le cas il y a dix ans. Au cœur des richesses du territoire, en puisant dans les ressources naturelles, (marbre, bois, liège, osier, kaolin) les entreprises font émerger leur identité, leur image de marque singulière, le Made in Portugal à la conquête d’un marché plus pointu, de décorateurs, d’architectes et de collectionneurs et d’une évolution culturelle. En voici quelques exemples.

WEEWOOD. En 1964, deux frères travaillent ensemble dans un petit atelier de menuiserie au nord du Portugal, devenu au fil des ans, l’entreprise Móveis Carlos Alfredo spécialisée dans la fabrication et l’exportation de meubles en bois massif. En 2012, la marque Wewood – Portuguese Joinery est née. Les fondements de l’entreprise reposent sur la qualité des matériaux, le façonnage du bois poli, et le design intemporel, avec des pièces produites en petites séries, dans une entreprise à taille humaine. Son ambition ? Créer du mobilier haut de gamme qui dure, valoriser l’esthétique du bois et ses finitions dans chaque projet, comme Contador, un buffet avec des tiroirs, créé en hommage aux comptoirs portugais, édité en 10 exemplaires à l’occasion des 10 ans de la marque. Les bases du design portugais sont amorcées grâce à la collaboration active de designers espagnols, portugais ou allemands, tels que Bambustudio, Edeestudio, Christophe de Sousa, Christian Haas, JC Berlin.

Contador est fabriqué dans les règles de l’art de l’ébénisterie, en bois massif et finitions en laiton et cuir.

VICARA Studio est une agence créative qui associe designers, artisans et industriels, dans une approche commune, pour développer un écosystème durable, avec des matériaux tels que la céramique, le verre, le bois. Si la poterie traditionnelle (gamme Tasco poterie typique en argile rouge) est toujours au catalogue, des designers portugais se sont emparés de ces belles techniques artisanales de la céramique et influencés par sa gastronomique traditionnelle. Celle combinant vannerie, en aiguilles de pin et céramique, à Caruma, est particulièrement remarquable, et a donné naissance à des vases mêlant deux techniques, dans un ensemble hybride.

Faisant partie de la collection permanente du Musée de la mode de Lisbonne (MUDE), ces vases sont une création de l’artiste Eneida Tavares

Fondée en 1951 dans la région de Guimarães, BELO INOX exporte plus de 70 % de ses produits, dans plus de 30 pays ! Présents dans l’univers des arts de la table, sur les salons européens, Maison & Objet et Equiphotel, à Paris, Ambiente à Francfort ou encore Host, à Milan, Belo Inox se dirige vers une stratégie à l’international (Corée du Sud, les États-Unis, le Japon, la France, le Mexique, l’Espagne et l’Égypte). Chaque produit en acier est fabriqué dans la recherche de l’excellence avec de récentes technologies de pointe. La finesse des couverts, les aspects de surface mat satiné font évoluer l’art de la coutellerie vers la modernité et la sobriété. Avec des partenariats tels que tels que Vista Alegre et Grestel, la marque s’oriente notamment vers la fabrication de produits exclusifs pour les restaurants gastronomiques.

Burel Factory
Belo inox

Originaire des montagnes de Serra da Estrela, BUREL FACTORY est une marque durable qui valorise le textile 100 % laine, ainsi que d’autres tissus. Sous la houlette du directeur artistique et designer Rui Tomás, la marque promeut le patrimoine, et le design avant tout, en créant des dessins spécifiques pour l’architecture intérieure et des revêtements et solutions acoustiques. Suite à la reprise d’une ancienne usine et de ses métiers à tisser artisanaux,  les propositions s’étendent aux accessoires de mode et de décoration et  dont certains sont fabriqués à base de chutes non utilisées de tissus, poursuivant ainsi sa mission zéro déchet.

Sofalca à la Paris Design Week

Spécialisée dans la transformation du liège, 100% naturel et durable, SOFALCA est divisée en trois activités et donc trois marques distinctes. Isocor fabrique avec les déchets du liège des panneaux d’isolation phonique, thermique et anti-vibration, essentiellement pour le bâtiment et l’industrie. Gencork explore la symbiose entre ce matériau écologique et les processus de fabrication de haute technologie. Le liège expansé est transformé grâce à des algorithmes basés sur le design génératif, fortement inspirés par le monde scientifique. En découlent des panneaux qui optimisent les propriétés de ce matériau, mais aussi ajoutent une valeur esthétique. Blackcork s’est spécialisé dans la création et production de mobilier contemporain, née en 2013 avec Toni Grilo directeur artistique. Ce fabricant qui produit du liège noir expansé depuis 1966, parie l’avenir, avec un design original et innovant.


Rédigé par 
Anne Swynghedauw

Vous aimerez aussi

Temps de lecture
21/11/2025
Retour sur les talks et les tables rondes Intramuros au salon EspritContract

Pour sa troisième édition, EspritContract organisé en parallèle d’EspriMeuble, était de retour à la Porte de Versailles du 15 au 18 novembre. Un moment de rencontres et d’échanges entre les marques et les professionnels mais également l’occasion pour Intramuros de prendre part à la médiation de plusieurs conférences thématiques.

Hôtels, bureaux, lieux hybrides : la mutation des espaces de vie

Invités :

Pierre-Alexandre Pillet, fondateur et CEO de Sowen
Valentin Moubèche, directeur de programmes chez Galia Groupe
Patrick Jouin, designer et co-fondateur de Jouin Manku


[Vision de marque] Upcycling : le design vertueux

Invitée :

Karin GINTZ, Directrice générale de Vitra France

[Vision de marque] Le sur-mesure : nouvelle excellence

Invité :

Jason BRACKENBURY, Président de FLOS France

[Vision de marque] Réinventer le récit hôtelier

Invité :

Jean-Philippe Nuel, architecte et architecte d'intérieur

Ergonomie - le design au service du bien être

Invités :

Frédéric SOFIA, designer
Karin GINTZ, directrice générale - Vitra France
Jason BRACKENBURY, Président - Flos France

Temps de lecture
10/11/2025
EspritContract : chez André Renault, l’innovation comme ambition

Fabricant français de literie d’exception, André Renault participe pour la première fois au salon EspritContract. Entre innovations technologiques et recherches continues pour une meilleure qualité de sommeil, la marque poursuit le développement de son réseau hôtelier afin de proposer ses services au plus grand nombre. Rencontre avec Erec Glogowski, PDG de la marque depuis 2020.

Pour sa troisième édition, EspritContract se tiendra du 15 au 18 novembre au Parc des Expositions de la Porte de Versailles.Plus d’informations sur : https://www.espritmeuble.com/le-salon/secteurs/secteur-contract.htm

Dans votre activité, que représente le secteur du contract et comment s’organisent les projets chez André Renault ?

André Renault est aujourd’hui le leader de la literie haut de gamme en France, tant en matière de marque que de distribution, avec un chiffre d’affaires annuel de 36 millions d’euros, dont 90 % proviennent du secteur contract, pour 170 salariés. C’est une entreprise relativement unique en Europe : nous produisons exclusivement à la demande, sans stock de produits finis mais cela ne nous empêche pas de proposer près d’un million de combinaisons possibles, avec un délai moyen de production d’une semaine.

Vous développez vos produits en collaboration avec des professionnels pour offrir la meilleure qualité de sommeil. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Nos produits reposent sur plusieurs piliers essentiels : le meilleur sommeil, le confort personnalisé, le design à la carte et l’expérience utilisateur. Nous travaillons notamment avec des neurologues spécialistes du sommeil, qui nous ont aidés à identifier les principaux critères d’un sommeil réparateur, directement applicables à la literie à savoir : la liberté de mouvement, car nous bougeons entre 50 et 60 fois par nuit ; la progressivité du matelas qui doit être doux à l’accueil et ferme en soutien ; l’indépendance de couchage, pour ne pas déranger son partenaire ; et enfin la thermorégulation, indispensable puisque nous perdons en moyenne 33 cl d’eau par nuit. De fait, tous nos produits sont conçus dans ce sens pour respecter au mieux ces critères.

Pour le contract, vous travaillez avec des hôtels. Comment concilier cette personnalisation pour satisfaire le plus grand nombre ?

Chaque projet est développé en direct avec l’hôtelier, afin de lui proposer les produits les plus adaptés à ses besoins. Nous ne travaillons que sur mesure, sans référencement sur de grandes plateformes hôtelières, car nous privilégions la personnalisation et la proximité. En général, nous partons d’une base médium pour convenir au plus grand nombre, puis nous adaptons le sommier selon le type de chambre et le niveau de confort souhaité : sommiers à ressorts, électriques, à lattes actives ou passives… Le niveau de prestation et la localisation de l’établissement influencent également nos propositions, car les attentes varient selon la clientèle et les régions. Parmi nos projets significatifs, il y a notamment notre collaboration avec le réseau Hôtels & Préférence, pour le Domaine de la Bretesche notamment, mais également les chalets de luxe Mobialp.

Des actualités à venir ?

Nous travaillons en permanence sur de nouveaux produits toujours plus innovants. Actuellement, nous développons une literie haut de gamme avec dosseret lumineux intégré et diffusion musicale, ainsi qu’un concept de literie tapissière modulaire et personnalisable, permettant de remplacer uniquement les tissus ou certains éléments décoratifs sans changer le produit dans sa totalité.

Vous avez longtemps participé au salon EspritMeuble, mais c’est une première chez EspritContract. Qu’attendez-vous de cette participation ?

En effet, nous avons bâti un réseau autour d’EspritMeuble, mais notre objectif est désormais de développer notre présence dans le contract et particulièrement dans le secteur hôtelier. Participer à EspritContract est l’occasion de faire mieux connaître la marque, de valoriser notre savoir-faire et de renforcer notre position sur le marché.

Temps de lecture
3/11/2025
En Allemagne, une exposition inédite dédiée à Charlotte Perriand

À Krefeld, en Allemagne, l’exposition « Charlotte Perriand, l’art d’habiter », présentée jusqu’au 15 mars 2026 au Kaiser Wilhelm Museum, propose une rétrospective de l’œuvre de la designeuse à travers les différents concepts et structures de pensée sur les espaces domestiques, fruits de 70 ans de création.

« Le meilleur moyen de rendre hommage au travail de Charlotte, c'est de parler d’elle. » Voici les mots prononcés par Pernette Perriand-Barsac lors de l’inauguration de cette exposition inédite. En effet, pour ce qui s’avère être la plus grande rétrospective consacrée à Charlotte Perriand en Allemagne, la fille de la créatrice et son mari Jacques Barsac, tous deux en charge des archives Charlotte Perriand depuis sa disparition en 1999, ont choisi Krefeld comme premier point d’ancrage. « Ce qui est le plus difficile dans une exposition de Charlotte, c’est qu’on se base sur 70 ans de créations, mais que cela concerne aussi bien des projets d’architecture, de design ou de photographie. Les possibilités sont immenses », confiait Jacques Barsac.

Exposition "Charlotte Perriand. L’Art d’habiter", installation  in-situ au Kaiser Wilhelm Museum à Krefeld en Allemagne. Table en Forme libre, 1938 © FLC, VG Bild-Kunst, Bonn, 2025 © VG Bild Kunst, Bonn, 2025 Photo : Dirk Rose

Sous le commissariat de Katia Baudin, directrice du musée, et Waleria Dorogova et avec le soutien de Pernette Perriand-Barsac, Jacques Barsac ainsi que Cassina, cette exposition offre une nouvelle lecture du travail de la designeuse — d’abord connue pour sa collaboration avec Le Corbusier entre 1927 et la fin des années 1930, mais également pour avoir développé, tout au long de sa carrière, de nombreux projets et concepts répondant à des problématiques sociétales et environnementales, dont le parallèle avec celles que nous rencontrons encore aujourd’hui est presque troublant.

Une relecture à travers le prisme de l’aménagement domestique

Répartie sur 1 200 m², la partie principale de l’exposition présente plusieurs projets marquants : du célèbre Salon d’Automne de 1929 - spécialement reconstitué pour l’occasion -, à ses nombreuses expositions et collaborations au Japon - notamment le projet initié pour le ministère de l’Industrie entre 1940 et 1943 -, en passant par l’aménagement de la station des Arcs entre 1967 et 1988. Des projets qui nous font tous voyager dans le temps avec une certaine nostalgie, au cœur de son univers. « Il était important pour nous de reconstituer ces espaces en faisant vivre les pièces dans différents contextes, pour tenter de comprendre au mieux sa pensée », explique Katia Baudin.

Exposition "Charlotte Perriand. L’Art d’habiter", installation in-situ au Kaiser Wilhelm Museum à Krefeld en Allemagne. Reconstitution du salon d’Automne de 1929 par par Cassina © FLC, VG Bild-Kunst, Bonn, 2025 © VG Bild Kunst, Bonn, 2025 Photo : Dirk Rose

Fascinée par les matériaux et l’industrie, notamment le tube et l’acier, Charlotte Perriand a conçu de nombreuses pièces de mobilier devenues iconiques, à l’image de la chaise longue LC4 créée en 1928, avec Le Corbusier et Pierre Jeanneret, le fauteuil Grand Confort ou encore sa célèbre table en forme libre de 1938, imaginée pour son appartement de Montparnasse à Paris, dont l’originale a été exceptionnellement prêtée par le Centre Pompidou pour l’exposition. Au total, ce sont près de 500 pièces de mobilier, croquis et photographies qui ponctuent les espaces et permettant de mieux saisir sa vision engagée et profondément réfléchie de l’aménagement domestique. « Charlotte Perriand n’était pas seulement designer, elle était aussi une instigatrice d’idées qu’elle publiait régulièrement. Elle ne se limitait pas au mobilier : elle s’intéressait aux humains et à leur manière de vivre, de façon globale », ajoute Katia Baudin.

Exposition "Charlotte Perriand, L’Art d’habiter", installation in-situ au Kaiser Wilhelm Museum à Krefeld en Allemagne. Banquette Méandre et Table basse Sicard, reconstruites par Cassina et la chaise-longue Tokyo prototype par Cassina © FLC, VG Bild-Kunst, Bonn, 2025 © VG Bild Kunst, Bonn, 2025 Photo : Dirk Rose


Aux Villas Haus Esters et Haus Lange, un focus sur son travail au Japon et ailleurs

Et qui dit rétrospective exceptionnelle, dit déploiement exceptionnel. En plus de la présentation au musée, l’exposition s’étend à un second espace, non loin de là, au sein des Villas Haus Esters et Haus Lange, toutes deux imaginées par Ludwig Mies van der Rohe en 1927. À la Haus Lange, la thématique centrale est « La Synthèse des Arts » et met en lumière le travail de Charlotte Perriand lors de ses séjours au Japon, en Indochine et au Brésil. Quant à la Haus Esters, elle accueille une exposition complémentaire, contextualisant la rétrospective du musée et proposant d’autres pièces issues de la collection d’art du Musée de Krefeld, articulées avec l’œuvre de Perriand.

Exposition « Charlotte Perriand, L’Art d’habiter », installation  in-situ à la villa Haus Lange. Bibliothèque Nuage, reconsitution par Cassina et Tabouret Berger, issues de la collection iMaestri de Cassina © VG Bild Kunst, Bonn, 2025 Photo : Dirk Rose

Une exposition itinérante à l’échelle européenne

Présentée pendant quatre mois et demi, jusqu’au 15 mars 2026 à Krefeld, l’exposition voyagera ensuite vers deux autres institutions européennes, avec l’objectif d’élargir encore la portée internationale du travail de la designeuse. Ainsi, du 1er mai au 13 septembre 2026, elle sera présentée au Musée d’Art Moderne de Salzbourg, en Autriche, avant de s’installer à la Fondation Joan Miró, à Barcelone, du 22 octobre 2026 au 27 février 2027. Une même exposition installée au sein de différents espaces, offrant à chaque fois une nouvelle interprétation et une scénographie repensée, de quoi continuer à faire vivre l’œuvre de Charlotte Perriand encore longtemps.

Exposition « Charlotte Perriand, L’Art d’habiter », installation  in-situ à la villa Haus Lange. Chaises Ombra Tokyo, issues de la collection iMaestri de Cassina © FLC, VG Bild-Kunst, Bonn, 2025 © VG Bild Kunst, Bonn, 2025 Photo : Dirk Rose
Exposition « Charlotte Perriand, L’Art d’habiter », installation in-situ à la villa Haus Lange. Tabourets Berger, issus de la collection iMaestri de Cassina et Table basse Rio, prototypée par Cassina © VG Bild Kunst, Bonn, 2025 Photo : Dirk Rose
Temps de lecture
6/11/2025
Les faits et gestes d’Hugo Besnier exposés le long de la Seine

Fondateur d’Hartis, le designer Hugo Besnier investit jusqu’au 30 novembre un appartement parisien, quai Anatole-France, pour y présenter sa nouvelle collection : Tour de Mains.

« C’est un appartement qui m’a toujours fait rêver. Pouvoir y exposer aujourd’hui est une chance », annonce Hugo Besnier depuis la vaste véranda de cet appartement ouvert sur la Seine. C’est dans cette ancienne propriété du couturier Pierre Cardin, prêtée par l’agence Barnes jusqu’au 30 novembre, que le fondateur d’Hartis présente Tour de Mains, sa nouvelle collection. Composée d’une trentaine de pièces, pour la majorité nouvelles à l’exception de quelques éléments imaginés pour des projets précédents mais redessinées, la collection se découvre de salle en salle. Transcription de l’univers d’Hugo Besnier, celle-ci a été imaginée pour fonctionner comme un tout. « Mon but était de créer un ensemble harmonieux, mais en évitant à tout prix l’effet catalogue, avec le même détail et la même finition partout. C’est quelque chose à la mode, mais je voulais absolument éviter cette facilité », revendique le designer, qui est à l’origine d’un ensemble avant tout usuel, dans lequel « on n’a pas peur de poser un verre ou de s’asseoir ».

©Matthieu Salvaing

Le geste créateur

La chaise Biseau, la table d’appoint Cintrage ou encore la suspension Ciselure. En lisant le catalogue de l’exposition, la philosophie d’Hugo Besnier s’impose rapidement. « Chaque pièce porte le nom d’une technique artisanale ou d’un outil, car Tour de Mains est un hommage à l’écosystème de l’artisanat. » Conçue avec l’appui des Meilleurs Ouvriers de France et des Compagnons, la collection a été imaginée comme un vecteur de mise en valeur du geste : de celui du dessinateur, auquel le designer se prêtait déjà enfant lorsqu’il s’ennuyait à l’école, jusqu’à celui du fabricant. Un principe guidé par la rencontre de deux mondes : celui d’une construction rationnelle, fruit de l’intelligence humaine d’une part, et la notion d’évolution plus aléatoire et organique de la nature d’autre part. Une dualité héritée de son enfance passée entre Fontainebleau et Paris ; « les arbres et les immeubles haussmanniens » mais aussi caractéristique de ses inspirations. « Le mobilier Louis XIV et le repoussement des limites artisanales dans une sorte de perfection, parfois au détriment du fonctionnalisme, me parlent tout autant que son opposé, le style scandinave. Quant au Wabi-Sabi et à l’idée de beauté dans l’imperfection, j’y vois une certaine résonance avec mon approche », assure le designer, dont la collection a été l’occasion de développer de nouvelles techniques, parmi lesquelles le ponçage et le polissage de la croûte de cuir.

©Matthieu Salvaing

Un parcours façonné par la création

Inspiré par les dessins de sa mère et la délicatesse de sa grand-mère, « qui dissimulait les portes et recherchait l’harmonie en accommodant les meubles avec des fleurs de saison », le designer se souvient avoir « toujours voulu être architecte d’intérieur ». Mais c’est lors de ses études en école de commerce que l’idée se concrétise, avec son premier appartement étudiant « entièrement dessiné pour qu’il ne ressemble à aucun autre ». Un projet personnel qui l’amène rapidement à repenser l’intérieur de l’hôtel particulier de son parrain de promotion. Dès lors, la machine est lancée et Hartis naît en 2020. Puis les choses s’enchaînent : d’abord sur le continent américain, avec un premier article dans le AD américain, puis une place dans la Objective Gallery de Soho, d’où naîtront plusieurs projets. Ce n’est qu’avec Tour de Mains que le designer revient sur la scène française. Un projet mené dans la continuité de son parcours, dans lequel la qualité du geste est aujourd’hui le qualificatif premier de son approche.

©Matthieu Salvaing
Inscrivez-vous à notre newsletter pour recevoir chaque semaine l’actualité du design.