Broderies de Caudry : artisanat et dentelles du futur
Exposition (Re)belles Dentelles par on aura tout vu, Broderies de Caudry © Pascal Auvé

Broderies de Caudry : artisanat et dentelles du futur

Le musée des dentelles et broderies de Caudry valorise la modernité de son patrimoine vivant et des ateliers de son territoire via des expositions temporaires de jeunes couturier. Avec six maisons dentellières encore en activité, Caudry est aujourd’hui le pôle mondial pour la fabrication de la dentelle destinée à la haute couture et au prêt-à-porter de luxe. Le musée, situé dans un ancien atelier de 1898, évoque aussi les autres arts textiles du Caudrésis. Tissage, tulle, guipure et broderie font partie de la tradition textile de Caudry. Il se projette surtout dans l’avenir avec des expositions temporaires régulières qui mettent en avant le travail de couturiers actuellement en vogue. En ce moment, et jusqu’au 24 décembre 2022,  le collectif On Aura Tout Vu, dévoile sa passion pour le détournement des belles dentelles.


Roger ne s’y attendait pas. Des gens venus des quatre coins de France et d’ailleurs l’écoutent parler religieusement. Scrutent ses moindres faits et gestes. Dissèquent chacun de ses mouvements et admirent sa dextérité, suivent des yeux le fil de son histoire (et de son ouvrage)… ou du moins ils essaient. « Il y a quelque chose de magique quand on voit tous ces fils se croiser, se nouer, s’entrelacer et devenir s’enthousiasment devant ce crochet fabriqué de ses mains à l’aide d’un hameçon de pêche et d’une douille de cartouche ramassée dans les bois. » Puis quand le silence revient, après le ballet des 1096 chariots qui viennent capturer un fil de trame que la navette de la chaîne vient de soulever, les questions fusent. « Que se passe-t-il si un fil casse ? » « Combien de temps faut-il pour faire un centimètre de dentelle sur ce métier Leavers de 1891 ? » « Etes-vous artisan d’art ou artiste ? « Quelles sont les qualités à avoir pour pratiquer ce métier d’art ? » « Combien êtes-vous en France et dans le monde à savoir faire cela ? »

Exposition (Re)belles Dentelles par on aura tout vu, Broderies de Caudry © Pascal Auvé

À la cinquantaine passée, le tulliste a vu sa carrière professionnelle prendre un tournant absolument inattendu. C’est pourtant une évidence. Le caudrésien est le meilleur des guides conférenciers qu’un musée puisse rêver avoir. Pendant plus de 23 ans, il a fabriqué de la dentelle sur des métiers centenaires de Sophie Hallette, l’une des six dernières entreprises mondiales capables de produire cette dentelle exceptionnelle, aujourd’hui rassemblées sous le label Solstiss. Ou plutôt il a réglé les machines qui ont permis de fabriquer la plus belle, la plus fine et la délicate des dentelles : la Leavers.

Un peu de mécanique

Contrairement à la plupart des autres dentelles, la dentelle Leavers n’est pas tricotée. Les plus courantes, celles que l’on achète dans le commerce, en grande diffusion, qui court partout sur les bretelles de soutiens gorge jusque dans les dos, qui subliment les manches, cols ou poignets de nos chemisiers, voire sur le corps tout entier, sont réalisées comme des pulls. Il s’agit de mailles dont les boucles s’enchevêtrent les unes dans les autres. Un seul fil est crocheté pour constituer l’étoffe.

Exposition (Re)belles Dentelles par on aura tout vu, Broderies de Caudry © Pascal Auvé

Leavers ou Textroniques

À l’inverse, la dentelle Leavers est réalisée sur un métier spécifique, baptisé métier Leavers du nom de son inventeur britannique John Leavers. Apparu en 1813 et après avoir fait la fortune des tisserands caudrésiens qui ont su exploiter toutes les capacités de ces métiers, il n’en reste aujourd’hui que très peu et leur fabrication s’est arrêtée à la moitié du siècle dernier. Les seuls encore en activité le sont en France, exclusivement dans le Nord. À Calais, les métiers plus étroits pourvoient la dentelle Leavers de la lingerie et de la corsetterie haut de gamme.

Exposition (Re)belles Dentelles par on aura tout vu, Broderies de Caudry © Pascal Auvé

À une cinquantaine de kilomètres de là, Caudry, qui n’a pas perdu son outil de production durant la première guerre mondiale, a pu offrir de larges métrages de la plus fine et de la plus délicate des dentelles. C’est sur des métiers Leavers de Caudry que les dentelles des robes de haute couture sont imaginées, conçues et produites. Les couturiers estiment d’ailleurs que la Leavers est la « vraie » dentelle. Les autres, « textroniques » ou « Rachel », n’en seraient que des très pâles imitations. John Leavers peut en outre se flatter d’être le père du seul tissu né en Europe et d’avoir a mis au point un métier à tisser (qui reprend le principe du tissu) auquel une étape de nouage supplémentaire rend l’étoffe beaucoup plus aérée.

Orgues de Barbarie

En effet, les rangées horizontales de fils qui sont traversées alternativement et selon un ordre très précis, de l’ordre de la partition de musique, justement programmé sur des cartons qui rappellent ceux des orgues de Barbarie, peuvent s’arrêter à tout moment … puis reprendre plus loin.  La Leavers ressemble à réseau tentaculaire et arachnéen de petits nœuds dont la finesse et la légèreté sont sans pareil. Ils forment des dessins, des graphismes et des perspectives qui font toujours aujourd’hui le bonheur des stylistes de mode. Au-delà des motifs floraux et végétaux, dont les programmes jacquards s’entassent à perte de vue dans les réserves du musée, la tendance s’oriente très clairement vers des esthétiques beaucoup plus géométriques, voire cubistes ou pointillistes.

Collection couture ON AURA TOUT VU © Elisabeth Pantaleo
Collection couture ON AURA TOUT VU © Guillaume Roujas

On a pas encore tout vu

C’est une évidence lorsque l’on poursuit le parcours de la visite du musée. Comme de tradition, le premier étage de l’ancien atelier de dentelle en brique rouge et à large baie vitrée qui abrite le musée, consacre son espace à une exposition temporaire contemporaine. En ce moment Caudry met à l’honneur le collectif de haute couture On aura Tout Vu. Composé de Livia Stoïanova et de Yassen Samouilov, On Aura Tout Vu est une maison anticoformiste, qui a fait défiler des drones, sculpté de la céramique, bakélite ou composite pour habiller des corps féminins, et fait voler dans les plumes pas mal d’idées reçues sur cette activité typiquement française à cheval entre l’artisanat et l’art. Elle est extrêmement fidèle à la dentelle Leavers et n’a jamais travaillé qu’avec de « vrais denteliers » – ceux de Caudry. L’exposition (Re)Belles dentelles braque les projecteurs sur leur extrême créativité mais aussi sur l’immense potentiel de la dentelle Leavers. Elle apparaît ici sous un jour très moderne, presque futuriste.


Rédigé par 
Isabelle Manzoni

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12/9/2025
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Lancé cette année, le France Design Impact Award valorise les innovations ayant un impact positif sur la société, l’environnement et l’économie. Pour cette première édition, les 13 lauréats ont été dévoilés en exclusivité le 12 septembre par Mathieu Lehanneur lors de la soirée d’inauguration. Les 40 nominés sont quant à eux tous exposés au Wilde, dans le 4e arrondissement jusqu’au 22 septembre.

Exposition « Messages/Images, graphisme d’intérêt général » — du 12 au 30 septembre, Le Havre (Normandie)

Portée par le CNAP et la Cité internationale de la langue française, cette exposition réunit 16 designers graphiques invités à explorer des thèmes contemporains tels que la démocratie ou la diversité à travers des affiches engagées. En parallèle, des ateliers de médiation permettront au public d’expérimenter le graphisme comme un outil critique, citoyen et créatif.

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Dans cet atelier de design participatif, chaque participant est invité à remplir une forme hexagonale en papier recyclé, en réponse à une question liée à l’écologie. Pour y répondre, trois couleurs associées à des mots ou ressentis leur seront proposés pour guider leur création. L’ensemble des réalisations sera ensuite assemblé en une mosaïque murale collective, présentée comme œuvre artistique et témoignage visuel des engagements écologiques citoyens.

Exposition « Le Design utile, une pédagogie du faire et du sens » — du 12 au 30 septembre, Fort-de-France (Martinique)

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12/9/2025
Grands Prix de la Création : découvrez les lauréats 2025

La ville de Paris a remis le 11 septembre les Grands Prix de la Création 2025 qui récompense la jeune création engagée et en cohérence avec les enjeux sociétaux actuels.

Organisés par le Bureau du Design, de la Mode et des Métiers d’art (BDMMA), les Grands Prix de la Création de la Ville de Paris récompensent depuis sa création en 1993 des créateurs engagés ayant une pratique à la fois innovante, responsable et ancrée dans les réalités contemporaines. Cette édition a comme chaque année récompensé huit lauréats dans les domaines de la mode, du design et des accessoires, soulignant la vitalité d’une scène parisienne en constante évolution. Pour cette édition, le jury était présidé par le designer Mathieu Lehanneur.

Un tremplin sans précédent

Plus qu'une reconnaissance, ces prix constituent un véritable tremplin comme l’a rappelé Nicolas Bonnet-Oulaldj, adjoint à la Maire de Paris : “Plusieurs anciens lauréats ont participé aux Jeux olympiques de Paris 2024, témoignant de la portée concrète de ce soutien institutionnel.” Un appui sur lequel les créateurs pourront s’appuyer pour développer des projets célébrant la perméabilité entre l’art et la poésie à l’image des créations picturales de Lucille Boitelle, mais également plus prospectifs et technique comme en témoigne le travail de Chloé Bensahel, mêlant fibres textiles et matériaux conducteurs, ou enfin célébrant la pluralité culturelle de la France en célébrant les savoir-faire guadeloupéens comme le fait le studio dach&zephir.

Catégorie design

  • Prix Révélation : Sacha Parent & Valentine Tiraboschi
Sacha Parent & Valentine Tiraboschi © Luc Bertrand
  • Prix Engagement : Florian Dach & Dimitri Zephir (dach&zephir)
ZÉSANT ©_dach&zephir

Catégorie mode

  • Prix Révélation : Auriane Blandin-Gall (CèuCle)
Cèucle, 2025 Summer edition © Julie Perrot
  • Prix Engagement : Jeanne Friot
© Jeanne Friot

Catégorie accessoires

  • Prix Accessoires de Mode : Émilie Faure & Serge Ruffieux (13 09 SR)
Collection Automne-Hiver 2023 © 13 09 SR
  • Prix Accessoires Bijoux : Elia Pradel (Anicet)
Anicet © Elia Pradel

Un soutien structurant

Chaque lauréat bénéficie d’une dotation de 18 000 €, financée par la Ville de Paris et le Fonds pour les Ateliers de Paris, en partenariat avec des acteurs clés du secteur : Galeries Lafayette, Francéclat, ADC, ESMOD, entre autres. Aussi, les lauréats du prix Engagement auront un espace dédié lors du salon Maison&Objet tandis que le Prix Révélation se verra offrir un espace pendant la Paris Design Week ainsi qu'une résidence au Campus Desgin et Métiers d'Art. Ils auront également tous un espace lors du  salon Collectible. Enfin, en termes de visibilité, les lauréats pourront compter sur le soutien des différents partenaires médias de l'évènement, dont Intramuros fait notamment partie.

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16/9/2025
Arnaud Lapierre assoit son assise au ministère de la Culture

Dans le cadre de sa rénovation, le ministère de la Culture se dote d’une assise hybride imaginée par le designer Arnaud Lapierre.

C’est un banc sur lequel on hésiterait presque à s’asseoir. Objet hybride, mi-assise mi-tapis, Rondin est une création du designer Arnaud Lapierre imaginée dans le cadre du regroupement des bureaux du ministère de la Culture, rue des Archives. Mené conjointement avec le Mobilier national, dont les collections comptent notamment les tables basses Cuts et Layers du designer ainsi que sa lampe Fold, l’appel à projet avait « pour seule contrainte son intitulé : une banquette » explique Arnaud Lapierre. Questionnant l’identité des zones d’accueil « généralement caractérisée par un tapis et des poufs », le designer souhaitait « attribuer au tapis la fonction d’un meuble qui aille au-delà d’une zone d’assise et d’attente primaire. » Imaginée pour susciter une l’émotion des visiteurs, la pièce trouve sa place en plein cœur de l’hôtel historique de Rohan.

Banquette Rodin, design Arnaud Lapierre

Une création en trompe-l’œil

Imposante avec son diamètre de presque cinq mètres, la création d’Arnaud Lapierre a été réalisée par l’ARC (Atelier de Recherche et de Création du Mobilier national). Une manière de mettre en avant les missions du Ministère et avec elles, les savoir-faire des artisans de Mobilier national sur des œuvres contemporaines. Composé d’un cylindre en mousse de soja pour garantir le confort de l’assise, le Rondin se part à chacune de ses extrémités d’un module en chêne des marais. « Un bois naturellement foncé, creusé sur une quarantaine de centimètres et agrémenté d’une plaque d’inox donnant l’illusion que le Rondin est entièrement creux. » Recouverte d’un tapis en laine tuftée réalisé par la tapisserie Robert Four d’Aubusson pendant 4 mois, la pièce a été pensée pour habiter l’espace. Une cohabitation entre design et architecture, renforcée par le choix des couleurs. Inspiré par les couleurs du tableau « Triomphe sur l’amour par les dieux » peint par Antoine Coypel au XVIIIe siècle et installé au plafond de la salle, Arnaud Lapierre a décidé de « coder l’œuvre afin de la retranscrire fidèlement en pixels. » Une démarche dont résulte un camaïeu tramé de 500 nuances. Un parti-pris esthétique fruit d’un dialogue entre les époques et les disciplines.

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15/9/2025
Jean-Baptiste Fastrez signe une collection avec Monoprix

Monoprix dévoile sa collection annuelle réalisée en partenariat avec la villa Noailles et un designer. Cette année, la marque s’est associée à Jean-Baptiste Fastrez pour la réalisation d’une collection chromée aux reflets futuristes.

Lauréat du Grand Prix du jury de la Design Parade Hyères en 2011, le designer Jean-Baptiste Fastrez s’est associé à cette institution et Monoprix. Une collaboration pour laquelle le créateur également scénographe a imaginé un ensemble de quinze petits objets décoratifs allant du bougeoir au tabouret en passant par le miroir. Focus sur l’esprit de cette collection en vente à partir du 16 septembre.

Bougeoirs © Jean-Baptiste Fastrez

Pourquoi avoir accepté cette collaboration avec Monoprix ?

Monoprix est pour moi l’une des dernières entreprises grand public à valoriser le travail des designers indépendants, car la plupart des marques ont aujourd’hui des bureaux de création intégrés. Et puis, travailler avec Monoprix, c’est également concevoir des objets pour tous, pas seulement pour une certaine partie de la population ou un petit nombre d’institutions et ça, c'était très stimulant ! D’autant qu’il y a avec Monoprix un côté très statutaire. On rentre presque dans une dimension patrimoniale, notamment en écho à Prisunic.

Votre travail de designer est souvent basé sur un jeu de contrastes qui interroge l’objet. Est-ce que cela a aussi été le cas dans cette collection ?

Oui, bien sûr, mais davantage sur la phase d’imagination. Je me suis beaucoup inspiré de l’architecture des villes utopiques, que ce soit The line, l’immense projet controversé dans le désert saoudien avec des formes post-modernes, ou le cinéma de science-fiction évidemment. Je pense à des films comme “2001, L’Odyssée de l’espace” de Stanley Kubrick ou encore “Interstellar” de Christopher Nolan et le robot chromé que l’on y voit. De manière générale, ce sont surtout les objets liés au futur. Mais ce qui est amusant, c’est que l’on peut aussi y voir une certaine résonance avec la vieille vaisselle un peu Art déco, à la Puiforcat, que l’on peut retrouver chez nos grands-parents. La notion de confrontation se trouve surtout dans les époques et dans les styles.

Tabouret ©Jean-Baptiste Fastrez

Sans surprise, cette nouvelle collection est encore extrêmement visuelle de par son matériau. Pourtant, elle semble encore très différente de vos autres créations ? 

Souvent, Monoprix demande aux créateurs de refaire ce qu’ils font habituellement, mais sous le branding de la marque. Je n’avais pas du tout envie de refaire les formes très rondes que l’on m’associe, à l’image du miroir mural Zodiac que j’ai fait pour Moustache en 2021. J’ai donc dû travailler un nouveau visuel. Le temps de développement étant trop court pour faire du verre, j’ai travaillé l’acier. Comme nous sommes globalement tous attirés par ce qui brille, j’ai d’abord réalisé des prototypes avec des vernis de couleurs. C’était une manière de donner un côté silverware à mes pièces. Mais rapidement, on m’a proposé d’utiliser des bains de chrome coloré. C’était quelque chose que je n’avais jamais essayé et j’ai beaucoup aimé le résultat. Des pièces ultra réfléchissantes, qu’on n'a pas l’habitude de voir, un peu comme des miroirs violet, jaune, bleu ou simplement argentés.

Le shooting de la collection est lui aussi assez surprenant. Pouvez-vous nous en dire plus ?

D’habitude, les shootings ont souvent lieu dans des maisons idéales, au bord d’une piscine etc… Nous avons réalisé le nôtre dans le désert des Bardenas dans le nord de l’Espagne. Je me suis dit que changer le cadre changeait la place des objets. C’était donc une manière de rendre la collection plus abstraite. Le désert fonctionnait bien car il faisait écho à mes inspirations, à la vie sur Mars et aux robots d’exploration. C’est d’ailleurs dans cette optique là que les photos ont été réalisées au ras du sol, comme pour donner l’impression qu’il s’agit d’édifices extraterrestres. Et puis cette esthétique chromée en plein milieu d’une zone aride, crée un contraste qui renvoie beaucoup à une vision futuriste selon moi. Ça renforce l’aspect organique et à la fois synthétique des formes qui font l’identité de la collection.

Miroir avec découpe ©Jean-Baptiste Fastrez
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