Frédéric Sofia, praticien du design

Frédéric Sofia, praticien du design

Comme un clin d’oeil au proverbe bien connu, c’est en designant que Frédéric Sofia est devenu designer : autodidacte accompli, son parcours est un exemple de ténacité  et prouve qu’il n’y a pas que les voies académiques qui mènent au succès. Du 24 au 28 mars, il signe la scénographie de l’Intramuros Café à Maison & Objet : une occasion de revenir sur sa collaboration avec Fermob, et d’exposer une partie de son travail caractérisé par le souci d’inscrire dans une histoire de marque des produits profondément intemporels.


Créatif et bricoleur depuis l’enfance, c’est jeune adulte que Frédéric découvre le milieu du design, et comprend, surtout, qu’il est vraiment fait pour ça. Sa rencontre avec Andrée Putman est un déclencheur  : « Elle a pris le temps de me recevoir et de regarder attentivement mon portfolio, avec des projets qui partaient dans tous les sens ! Elle m’a conseillé. Nous étions en 1993 et j’ai compris avec Andrée Putman que mon avenir immédiat de designer était plus chez les Trois Suisses ou Tati qu’à la galerie En attendant les Barbares. Même si les choses ont bien changées depuis, cette prise de conscience a été déterminante.»  Il s’associe pour créer Wombat, qui aura un certain succès d’estime. Puis intègre l’agence Cent degrés, où il travaille aussi bien sur le développement pour des projets industriels de matériel médical que sur des flaconnages de parfums. Depuis 2000, conçoit des produits pour l’habitat, indoor et outoor, en tant qu’indépendant.

Rodet, collection Kawa réalisée pour le contract, design Frédéric Sofia.
Ligne Roset, fauteuil de relaxation 35H, design Frédéric Sofia.

La rencontre avec Fermob

Parallèlement en 2001, il se penche pour Fermob sur la réinterprétation et l’adaptation des assises mythiques du jardin du Luxembourg. Il revoit et transforme tout de fond en comble sur les modèles Sénat présents dans le « luco » depuis 1923. En dessinant des accoudoirs en forme d’ailettes et des lattes d’assise en triple galbe il signe une adaptation originale, qui lui a demandé un intense travail d’observation et de détails. « C’est la même mais elle est différente » aime-t-il dire sur Sénat et Luxembourg en référence à une publicité Volkswagen pour la New Beatle.

Ainsi, et ce avant son tout premier lancement en 2003, l’ensemble fauteuil bas/repose-pieds Luxembourg se retrouve exposé au sein de l’exposition « Placenta » organisée à Paris par l’agence BETC Euro RSCG. Présenté en rose bonbon, l’objet fait alors un effet retentissant, nouveau et subversif dans l’univers du mobilier de jardin. Son accueil incite la société Fermob à intégrer plusieurs teintes de rose dans sa propre gamme couleur.

Le fauteuil Luxembourg sera le premier élément d’une longue collection : aujourd’hui, en comptant les ajouts de pièces (tables de formats différents, tabourets, rocking chair…, les actualisations, la gamme compte une trentaine de pièces ! Et une collection best-sellers pour le fabricant français, devenu référence à l’international dans le mobilier de jardin.

Fermob, collection Luxembourg.

Confiance et complicité

Fermob a fortement marqué le parcours de Frédéric Sofia : « Avec Bernard Reybier – président de Fermob – sest installée au départ une collaboration très liée à un fort esprit d’entreprise industrielle que nous avons en commun. Pendant les années 2000 nous construisions quelque chose, c’était passionnant. J’ai puisé dans l’identité profonde de la marque que j’ai développé en créant aujourd’hui 5 collections. J’aime être « au service de », ça fait partie de ma démarche, c’est important pour moi. » Au contact du fabricant, au fil des années, le designer a développé des compétences importantes dans la conception de mobilier avec l’aluminium : « Ses capacités plastiques et de recyclage sont exceptionnelles, et aussi ses possibilités uniques en terme de finition « .  « Je suis un designer heureux avec Fermob, mes créations sont pensées et produites industriellement, c’est tout ce que j’aime dans mon métier, la création industrielle».

Après Luxembourg, il signe Sixties la première  gamme tressée de la marque, puis l’innovant Ultrasofa, conçu comme une aire de repos.

Fermob, méridienne Ultra Sofa.
Fermob, collection Sixties © Philippe Frisée

Viendra ensuite Lorette, un travail long sur l’identité d’assise:  «J’ai développé un motif, un graphisme, qui associe la nature (la fleur)  et l’architecture (le losange). Lorette est un objet hybride à la croisée des archétypes « J’ai voulu créer une chaise en acier qui évoque l’esprit de la campagne française dans une version légère et sophistiquée. Ce projet a maturé pendant des années, il est le résultat de beaucoup de ruminations. »

Fermob, Banc de conversation © Philippe Frisée

Fermob, Chaise Lorette © Philippe Frisée

Des produits qui ont un sens et une histoire

Frédéric Sofia se définit comme un praticien du design : «Je suis un créateur mais ma façon de faire du design est classique. Je ne « pense » pas le design, ça ne me pose pas de problème. Pour moi l’enjeu est de faire du design, c’est comme une question de survie. » Il aime ancrer les objets dans une histoire :  « Faire des objets pérennes est un enjeu majeur aujourd’hui. Je n’essaie pas de faire un design qui soit remarquablement nouveau ou à la mode, mais qui soit une sorte de mise à jour subjective et personnelle d’une typologie qui m’est chère »

Ainsi,  la collection Luxembourg, est le fruit d’une réadaptation de la chaise du jardin du Luxembourg  : « Je l’ai adaptée, redesignée, transformée aux besoins industriels, aux codes d’aujourd’hui. La chaise Lorette est une vision urbaine de la chaise champêtre à médaillon. J’aime partager avec les gens la perception de cette continuité dans l’histoire des objets. »

Il conçoit ainsi Airloop comme un pur produit de l’histoire de Fermob : le fabricant conçoit depuis toujours des chaises en fil, comme la chaise 1900, et la Lune d’Argent de Pascal Mourgue : « la première s’inspire des Arts déco, la deuxième est une icône des années 80. J’ai longtemps cherché un dessin qui fusionnerait ces deux typologies clairement identifiées Fermob. Airlooop est ronde, en fil, comme la chaise 1900, elle a le même type de piétement que la chaise Lune d’argent, et les fils de dossier et d’accoudoirs sont solidarisés par deux anneaux forgés à la main. C’est un détail qui révèle l’identité profonde et l’histoire de Fermob. Et j’en suis fier : dans un coin de l’atelier industriel, il y avait un artisan. Ce n’est pas juste un concept, ou un effet de style, ça s’inscrit dans une histoire. »

Une collection Habitat en perspective

Avant tout  Frédéric Sofia aime inscrire ses collaborations dans le temps. En 2002 sort une collection qui est le fruit d’une collaboration murie de longue date avec Habitat : « J’ai  commencé avec une table, et depuis deux ans, j’ai une carte blanche pour créer toute une gamme de mobilier, luminaires, tapis, d’accessoires d’art de la table, autour de la salle à manger. » Le mobilier est en chêne massif, intemporel et légèrement rustique, à l’image de la marque.

Collection en cours pour Habitat, design Frédéric Sofia

Le designer a également travaillé des duos de couleurs la fois, doux et pop, pour une série de lampes à poser.

Collection en cours pour Habitat, design Frédéric Sofia

Dans ses recherches, Frédéric Sofia a travaillé également une recherche autour des arts de la table, en interrogeant nos pratiques et nos usages alimentaires, quitte à hybrider les bols et les assiettes, à repenser le dessin de couverts.

Une idée toujours logée dans un coin de la  tête, le crayon au bout des doigts, il mûrit petit à petit ses esquisses d’une façon obsessionnelle, tout en prenant le temps comme un allié.

Retrouvez prochainement le portrait complet dans le numéro 211 d’Intramuros.

Découvrez la scénographie de l’Intramuros Café à Maison & Objet, du  24 au 28 mars, Hall 7, parc des Expositions de Villepintes.

Rédigé par 
Nathalie Degardin

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18/7/2025
Concours Technogym x Intramuros : les Candidatures sont ouvertes !

En partenariat avec Intramuros, Technogym lance un concours pour imaginer l’avenir du fitness à domicile. Les candidatures sont ouvertes jusqu’au 29 août.

Sous le titre évocateur « La Home Gym du Futur », Technogym — marque reconnue pour ses équipements de fitness haut de gamme - lance un concours inédit. Cette initiative vise à mettre en valeur les talents émergents tout en encourageant des idées novatrices, durables et inclusives. En s’appuyant sur les besoins actuels en matière de pratique sportive et en anticipant les évolutions à venir, les participants sont invités à imaginer leur vision de l’entraînement à domicile de demain.

Un jury XXL pour cette première édition

Pour juger les différentes propositions des candidats au concours, les équipes d’Intramuros et de Technogym pourront compter sur l’expertise de 4 professionnels du secteur :

  • Le designer Patrick Jouin (studio Patrick Jouin iD)
  • Natacha Froger (agence atome associés)
  • L’architecte d’intérieur Ana Moussinet (Ana Moussinet Interiors)
  • L’architecte et designer Jean-Philippe Nuel (studio Jean-Philippe Nuel)

Après une délibération des membres du jury le 2 septembre prochain pour sélectionner les finalistes, les projets retenus seront mis en avant sur les réseaux sociaux et présentés au sein de la boutique Technogym pendant  Paris Design Week du 4 au 13 septembre.


Ce concours est l’opportunité pour les jeunes créateurs de faire valoir leur créativité et de gagner en visibilité. En effet, en plus de voir leur projet exposer pendant Paris Design Week, les finalistes pourront profiter de la communication via les canaux de Technogym, Intramuros, NDA et BED et pourront enrichir leur réseau lors de la remise des prix qui aura lieu le 17 septembre prochain. Le lauréat remportera 4 500 € de produits Technogym et vivra une expérience exclusive au Technogym Village à Cesena, en Émilie-Romagne (Italie), aux côtés du jury.

Une démarche d’inscription simple

Pour participer, les candidats devront proposer un brief complet avec un concept design, des planches graphiques et une note descriptive détaillée. Les dossiers devront être envoyés par email à l’adresse suivante : concourstechnogym@intramuros.fr

Tous les documents essentiels relatifs au concours sont disponible vie CE LIEN.

En cas de besoin et demandes spécifique, les candidats peuvent contacter le Technogym Interior Design Service, via Daniela D’Errico à l’adresse : dderrico@technogym.com ainsi que Yanis Aimetti, yaimetti@technogym.com pour le Technogym Marketing support & infos produit.

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9/7/2025
Spinning Around, la collection en mouvement de Sophia Taillet

Présentée en exclusivité dans la nouvelle boutique du Grand Palais, la collection Spinning Around de Sophia Taillet allie une approche artistique à un savoir-faire industriel méconnu : la technique du repoussage. Une série colorée et dynamique, à l’image de la designer qui aime mêler les disciplines.

À l’occasion de la réouverture du Grand Palais et de l’inauguration de sa boutique, Sophia Taillet a imaginé une collection exclusive, intitulée Spinning Around. Un projet qui s’inscrit dans la continuité de son travail amorcé avec le Spinning Mirror présenté lors de la Paris Design Week en 2024 et le travail de recherche Time Erosion, mené suite à l’obtention de la bourse « Monde Nouveau » en 2023. Un projet pour lequel elle a exploré duré un an les liens entre design et danse, en collaboration avec des artisans, un danseur et un ingénieur du son. « J’ai voulu interroger le rapport au corps à travers la manipulation d’objets encore en phase de réflexion. Une fois façonnés par l’artisan, ces objets passaient entre les mains du danseur, qui leur donnait une fonction. Je trouvais intéressant d’intégrer d’autres regards que celui du designer dans le processus et de les présenter par le biais d’une performance. » Une représentation s’était tenue à la Fondation Pernod Ricard, où danse et objets cohabitaient en parfaite synergie.

Collection Spinning Around

Associer matière et mouvement dans l’espace

Partie de ce projet symbolique et du Spining Mirror — remarqué lors de la Paris Design Week 2024 et de la Collective Fair de Bruxelles —, cette collection offre différentes déclinaisons qui mêlent à la fois la matière et mouvement. Les pièces sont faites en verre et en métal, les deux matériaux de prédilection de la créatrice, et réalisés à la commande, dans une dizaine de d’exemplaires pour le moment. Entre jeux de matière, de lumière et de formes évolutives en fonction de la disposition et l’espace dans lequel se trouve l’objet, Spinning Around est une collection qui n’est finalement jamais figée. « J’ai voulu créer une sorte de liberté visuelle au sein de laquelle le mouvement donne vie à l’objet. Le fait que les objets bougent permet de créer des effets visuels qu’on n’aurait pas s'ils étaient immobiles » Et pour cette collection, Sophia Taillet a choisit de se pencher sur la technique du repoussage, un savoir faire dont on parle peu mais qui n’en est pas moins intéressante à explorer. « C’est une technique qui n’est pas forcement médiatisée et je trouvais intéressant de la travailler, d’autant qu’avec mon expérience du verre, je ressens un devoir de transmission des savoir et des techniques. »

Collection Spinning Around

Un rendez-vous donné à la rentrée

En septembre, à l’occasion de la Paris Design Week du 4 au 13 septembre et des Journées du Patrimoine les 20 et 21 septembre, Sophia Taillet investira la cour du musée de la Chasse avec une installation cinétique en plein air, pensée comme une « danse silencieuse ». Neuf pièces de Spinning Mirror seront présentées en dialogue avec l’architecture du lieu. Une performance dansée viendra également accompagner l’installation.

Spinning Mirror
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10/7/2025
Drift chair ou la justesse des lignes

Le studio BrichetZiegler et Théorème Éditions se sont associés pour créer la Drift chair. Une chaise très graphique portée par des lignes fines au service de l'équilibre.

Comme pour chacune de leurs collaborations, David et Jérôme, les fondateurs de Théorème Éditions, dont la galerie eponyme est située sous les arcades du Palais Royal, se sont tournés vers un studio avec une demande : créer un objet sculptural, architectural et monolithique. Un triptyque dans l'air du temps que le studio BrichetZiegler, convié pour l'occasion, a naturellement retranscrit sur une chaise. Une pièce que le duo de créateurs affectionne particulièrement en raison de son échelle. « Une chaise est une surface parfaite car sa dimension permet de s’exprimer de façon sculpturale et plastique tout en abordant les aspects techniques d’un objet qui soutient le corps. » Un terrain de jeu idéal donc, autour duquel les designers ont imaginé une pièce « fonctionnelle et confortable pour dîner, portée par un dessin et une présence visuelle forte. »

Drift chair by Brichet Ziegler for Theoreme Éditions @Stéphane Ruchaud

Un jeu d'équilibre

Développée en à peine un an et demi avec le savoir-faire d'un menuisier installé à Pantin, la Drift chair – que nous pourrions interpréter par « chaise qui plane » - tire son nom de son assise en porte-à-faux. Supportée par deux planches latérales en guise de pieds, l'assise joue sur l'alternance des pleins et des vides pour offrir, de côté, tout le poids visuel de sa structure, et de face une certaine frugalité structurelle. Deux sensations renforcées par l'utilisation de courbes au niveau des zones de contact pour des questions de confort, mais aussi dans les angles. Une manière d'apporter de la fluidité à cet assemblage égayé par une galette aimantée en cuir lisse ou en tissu Kvadrat choisi par la galerie. En dessous, la surface à bois a été ajourée de manière à diminuer le poids de la chaise – déjà de 7,5kg – et solidifier la structure pour éviter qu'elle ne vrille.

Drift chair by Brichet Ziegler for Theoreme Éditions @Stéphane Ruchaud

Proposée en chêne et en noyer, la Drift chair est disponible dans une version cérusée où le veinage naturel du bois devient porteur d'un monochrome très graphique. Une alternative utilisée par Joseph Hoffmann dès les années 30 et désormais réinterprétée avec goût par le studio BrichetZiegler.

Drift chair by Brichet Ziegler for Theoreme Éditions @Stéphane Ruchaud
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9/7/2025
À la CFOC, six décennies d'exploration

Créée par François Dautresme en 1965, la Compagnie Française de l'Orient et de la Chine (CFOC) fête ses 60 ans. À cette occasion, Valérie Mayéko Le Héno, architecte DPLG et directrice artistique depuis 2016, évoque les évolutions de cette société indissociable des savoir-faire asiatiques.

Voyageur passionné et aventurier en quête de nouveautés, François Dautresme a fondé la CFOC en 1965. Quelle place occupe aujourd'hui son héritage dans l'identité de la marque ?

En tant que directrice artistique de la marque depuis 2016, je crois pouvoir dire que la manière dont nous travaillons est assez proche du concept de départ puisque nous continuons de voyager beaucoup à travers l'Asie. C'est important de garder un pied dans cette zone, où se trouve une douzaine de pays avec lesquels nous collaborons, mais aussi au-delà – en Italie pour l'édition textile, au Maroc pour les éponges et la broderie, au Portugal pour le travail de l'acier et des couverts, et au Mexique pour la fibre de palme -, car ce que nous cherchons, c'est avant tout un savoir-faire particulier ou de nouvelles techniques. Nous partageons de fait la passion de l'artisanat, mais aussi le plaisir de trouver des ateliers familiaux, des petites structures. Cette notion est très importante pour nous, car depuis 1965, l'idée est de valoriser des produits manufacturés. À travers ça, l'héritage principal est sans doute celui d'être du contact.

Tapis Ombrelle Sépia ©CFOC

La place du geste est donc véritablement importante au sein de la CFOC, mais comment concilier les savoir-faire anciens et asiatiques avec les besoins des consommateurs européens ?

Il y a longtemps eu un gap entre nos deux régions. Il y a encore une quinzaine d'années, les arts de la table en Chine se limitaient majoritairement à des bols et à des baguettes tandis qu'il était coutume de s'asseoir proche du sol en Asie alors nous avions tendance à nous asseoir de plus en plus haut en Europe. Il a donc fallu adapter tout cela à nos usages. Dès les années 90, à l'époque où la CFOC proposait principalement du mobilier chiné, souvent aux Puces de Pékin, François Dautresme a commencé à dessiner des éléments destinés au marché français. Un premier pas que nous avons complètement généralisé en 2011-2012, en insufflant à la compagnie alors en perte de vitesse, une nouvelle vision davantage adaptée à nos modes de vie, aux usages.

Collection Lotus ©CFOC

Et comment cela se traduit-il en termes de création ?

Nous avons voulu faciliter l'échange de regard entre l'Europe et l'Asie. Un bureau de style est ainsi né à Paris. Nous y travaillons à deux pour ce qui est de la conception design, plus une troisième personne chargée de la production. Celle-ci est principalement basée en Asie, car nous n'avons pas d'intermédiaire, et c'est elle qui nous permet de développer des produits sur le long terme – généralement entre 4 et 10 mois – et d'entretenir des relations pérennes avec les ateliers pour ne pas être sur du one-shot. Pour la majorité d'entre eux, notre collaboration oscille entre 8 et 10 ans, et c'est ce qui nous permet de pousser les savoir-faire et développer de nouveaux produits.

Table basse ultra noir en chêne teinté ©CFOC

L'une des richesses de la CFOC, c'est également l'étendue des matériaux travaillés. Comment les réinvente-t-on pour ne pas tourner en rond au bout de 60 ans ?

En fait, la question est surtout technique. Ce sont généralement des déclinaisons. Par exemple pour la laque, dans les années 50 à 70, on ne trouvait que des couleurs naturelles. Progressivement, on a évolué vers des colorants alimentaires pour diversifier les teintes, sans pour autant perdre le savoir-faire ancestral à base de sève de laquier. Cette année, nous proposons par exemple deux nouvelles couleurs, le bleu jun et l'ambre jun que nous avons travaillé avec notre coloriste basé dans un village près de Hanoï, au Vietnam. Pour ce qui est du tissu, la CFOC évolue notamment en passant de fibres naturelles à des fibres textiles pour répondre à des besoins spécifiques. C'est le cas de notre tapis tressé Kilim (une technique indienne) où le jute est remplacé par de la laine.

Lampe de chevet Naméko en porcelaine et laiton et courtepointe Samarcande en velours de soie et lin ©CFOC

De manière plus précise, comment avez-vous pensé la collection anniversaire ?

Elle a été guidée par une démarche en quelque sorte historique. J'ai réuni les origines de la CFOC en me replongeant dans de vieux articles de presse, des archives photographiques des anciennes boutiques et leurs vitrines aux scénographies imaginées par François Dautresme, mais aussi des produits dans les catalogues de vente. Bref, je me suis immergé dans la riche histoire de la société et j'ai confronté le passé et le présent. C'est ça qui m'a amené à développer la forme des ombrelles pour nos tapis, le concept de naturalité, le travail du pojagi – une méthode de couture que l'on peut rapprocher du patchwork -, le velours de soie que l'on retrouve sur les contrepointes Samarcande travaillées avec du lin par des artisanes brodeuses, sans oublier la réédition d'objets dans le rouge CFOC. Tous ces axes nous ont permis de créer des pièces en série limitées ou numérotées.

Tabourets signature en coloris bleu jun, verveine et blanc ©CFOC

Sur le plan commercial, la CFOC s'est progressivement ouverte au B2B. Qu'est-ce que cela a changé dans votre approche et quels sont les prochains défis à venir ?

Effectivement ! Depuis plusieurs années, nous développons le B2B pour proposer nos services des chefs ou des établissements hôteliers. C'est une autre manière de voir les choses. L'un de nos projets significatif est certainement la réalisation de pièces sur mesure pour l'hôtel SO/ Paris réalisé par le cabinet RDAI et livré en 2022. Parallèlement à ces nouveaux marchés, nous souhaitons également développer notre notoriété et étendre notre réseau aujourd’hui composé de trois boutiques sur Paris et de revendeurs en région. Nous réfléchissons donc à ouvrir un nouveau showroom ou des pop-ups store dans des zones balnéaires.

Plateau haut Étamine ©CFOC
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