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Après son exposition inaugurale, en septembre dernier, à sa seconde adresse, avenue Matignon, « Perrotin second marché » explore les relations entre l’art contemporain et le design avec des pièces de designers historiques, mises en regard d’œuvres des avant-gardes et du Pop art.
Sur les trois étages de l’immeuble, dans une scénographie très élégante, aux points de vue démultipliés, de Cécile Degos, réputée pour ses mises en scène en musée, « Perrotin Second marché » crée des « affinités électives » entre des « Totems » d’Ettore Sottsass, des sculptures animalières de François-Xavier Lalanne, deux meubles de Jean Royère et des toiles, gouaches, dessins de Matisse, Dali, Magritte, Giacometti, le Douanier Rousseau mais aussi d’Andy Warhol, Alain Jacquet, ainsi qu’un mobile de Calder. Au rez-de-chaussée, celles de Sottsass et des artistes Pop évoquent leur amour commun du quotidien et des coloris éclatants.

Dans une niche aux tons acidulés, les formes épurées et arrondies du totem « 5A » dialoguent paradoxalement avec « Usuyuki », toile de Jaspers John aux lignes géométriques, tandis que la pièce en verre et laiton « Maia Bowl » du chef de file du groupe Memphis et l’« étude pour nature morte avec jarre bleue et cigarette » de Tom Wesselmann nourrissent un même amour du bleu et des objets du quotidien. Ainsi l’expliquait Sottsass : « Ce qui m’a passionné, c’est que les artistes [Pop] prenaient pour thèmes les sujets du quotidien, la vie de tous les jours. La banalité était leur univers. À la place des madones, des christs, ils s’intéressaient à une coupe de fruits, à une boîte de soupe, à une voiture. Leur écriture était le langage de la rue. »
Les animaux, la nature et les hommes
Le second étage qui ressemble à une basse-cour très chic, parle d’amitié, d’inimitié et d’animaux. Là deux oies, un brochet, un « mouton transhumant » et un pacifique bélier en bronze conversent en silence, surveillés de près, sur les murs, par l’image en atelier du surréaliste Dali, très ami dans la vie avec le couple Lalanne, mais aussi par la délicate colombe semblant s’échapper d’un dessin de Magritte. Contre point à cette basse-cour idéale d’un autre monde, les gouaches et crayon aux lignes âpres et écorchées d’Alberto Giacometti, figure majeure de la sculpture, que n’appréciaient pas du tout les Lalanne, s’opposent à la rondeur de leur carpe en résine et feuille d’or.

Enfin, au troisième, dans une ambiance paisible où le naturalisme raffiné du « Cosy corner » de Royère en marqueterie de paille renvoie à la forêt luxuriante du « Nu au bain » du Douanier Rousseau, l’on apprend que le grand décorateur français réalisait également ses meubles en fonction de leurs ombres portées sur le sol ou les murs, comme Alexander Calder le faisait avec ses mobiles. Art & design, une affaire d’influences mutuelles ? A travers des pièces aux signatures prestigieuses, en « consignement », c’est-à-dire prêtées à la galerie, mais aussi achetées par Emmanuel Perrotin et ses associés Tom-David Bastok et Dylan Lessel, l’exposition « Tout n’est qu’influence » interroge la frontière ténue entre ces deux disciplines, par leurs regards communs sur les sujets, matières, couleurs et effets de lumière. Et remet quelque peu en question leur sacrosainte hiérarchie.

« Tout n’est qu’influence », exposition chez Perrotin Second Marché jusqu’au 19 mars 2022 (www.perrotin.com) au 8, avenue Matignon, Paris 8e.

C’est au cours de la remise des prix French Design 100 organisée dans la salle des fêtes du palais de l’Elysée qu’Emmanuel Macron a salué la création tricolore.
Pour cette seconde édition du FD 100, 100 lauréats, sélectionnés par un jury international de 17 membres, représentent le design, la décoration intérieure et l’architecture. Durant sa prise de parole, Bernard Reybier, président du French Design by VIA, a célébré le rayonnement du design espace et objet à l’international, en citant notamment des chiffres impressionnants. La création française est, je cite, « un hymne à la vie ! ». Hervé Lemoine, directeur du Mobilier national et président du jury, a mis en avant la politique de réconciliation entre design et artisanat et en se félicitant du rôle d’ambassadeur que joue son service rattaché au ministère de la Culture.
C’est un Président de la République détendu, main dans la poche, qui a commencé son discours en indiquant que « le design français est une discipline difficile à définir ». Emmanuel Macron a le mérite de connaitre ses classiques, en citant notamment certaines commandes passées auprès de designers et artistes. Il a conclu en beauté : « la maladie de l’Europe est la lassitude, et le quotidien se réinvente par le beau et le renouveau des sens, et c’est le rôle politique du designer. La magie du design est essentielle !»
Les 100 lauréats seront dévoilés tout au long du mois de janvier dans un « festival numérique » sur les réseaux sociaux du French Design.

Jusqu’au 13 mars 2022, les Magasins généraux à Pantin célèbrent les dix ans du programme de résidences artistiques au sein des manufactures de la maison Hermès. Volet français d’un évènement d’envergure ayant également lieu à Séoul et Tokyo, « Formes du Transfert » rend compte des dialogues féconds entre artistes et artisans, à travers une présentation pédagogique d’œuvres où l’art se met au service de la main et vice-versa.
Les résidences d’artistes de la Fondation d’entreprise Hermès sont des séjours de trois à quatre mois qu’un plasticien, parrainé par de grands noms de l’art actuel – Susanna Fristcher, Jean-Michel Alberola, Michel Blazy, Robert Deacon ou encore, parmi d’autres, Giuseppe Penone –, effectue dans ses manufactures. Pour ne citer d’elles, la Maroquinerie Nontronnaise, en Dordogne, la Holding Textile Hermès à Lyon, la Cristallerie de Saint-Louis en Moselle, Puiforcat à Pantin, ou la Maroquinerie des Ardennes ont accueilli environ 30 créateurs, entre 2010 et 2020. Durant cette immersion, ces derniers sont amenés à expérimenter de nouvelles modalités de production et utiliser quatre matières d’exception – cuir, cristal, soie et argent, en fonction de la spécificité des ateliers -, pour réaliser des œuvres en double exemplaire, l’une étant conservée par la Fondation, l’autre leur appartenant. « Venus sans aucun projet au préalable, explique Gaël Charbau, commissaire de l’exposition, les plasticiens se sont ouverts aux compétences des artisans, dans un rapport teinté d’émerveillement et d’observation réciproques. »


Art et matière en formes
Dans une scénographie colorée compartimentant le plateau des Magasins, l’exposition fait état de la richesse de cette collaboration, à travers des pièces dont le livret didactique, délivré au visiteur à l’entrée, en explique les ressorts. Parmi beaucoup, celles d’Oliver Beer, en résidence en 2012 à la cristallerie de Saint-Louis, évoquent le son. Entre autres, son œuvre Outside-In, « cornet accoustique » sortant d’une vitre en cristal, permet d’entendre les bruits extérieurs à partir de l’intérieur. Installée à la maroquinerie de l’Allan, en 2020, Bérengère Hénin décrypte les restes d’une fête avec Melancholia, joyeuse boule à facettes faite de 2000 petits morceaux de cuirs, mais aussi La fin de la fête, installation empreinte de nostalgie, composée d’un guéridon, de cotillons et d’objets du quotidien en cuir.


Autre exemple encore, Emmanuel Regent, actif entre 2018 et 2019 à la cristallerie de Saint-Louis, a créé une série d’aquarelles « de verre », comme Le Naufrage de l’Espérance, version en 3D et en cristal du tableau « Mer de glace » de Caspar David Friedrich, rendue possible grâce aux nouvelles technologies. Une présentation foisonnante qui interroge la porosité de l’art et de l’artisanat d’exception, à travers tous ses interstices.

Magasins Généraux, 1 rue de l’Ancien Canal, 93500 Pantin.

Après le report en mars de Maison & Objet, c’est le Salon du Meuble de Milan qui repousse à juin son édition 2022 et bouscule les agendas. Le point sur les prochains évènements.

Maison & Objet : Reporté du 24 au 28 mars 2022
Initialement prévu du 20 au 24 janvier 2022, le salon Maison & Objet, qui se tient au Parc des Expositions à Villepinte, a annoncé fin décembre le report de son édition initialement prévue fin janvier : celle-ci devrait se tenir au mois de mars, du 24 au 28 mars 2022. Cette nouvelle édition devait s’accompagner d’un parcours Maison&Objet In The City, qui est de ce fait également décalé du 23 au 28 mars. Pour le moment l’édition d’automne du salon est annoncée du 8 au 12 septembre, en même temps que la Paris Design Week.

Journées européennes des métiers d'art : annoncées du 28 mars au 3 avril 2022
Les JEMA 2022 sont maintenues du 28 mars au 3 avril 2022. À destination des passionnés des métiers d’arts et du patrimoine, les JEMA proposent chaque année de retrouver les professionnel partout en France et du 1er au 3 avril dans toute l’Europe.

Art Paris Art Fair : annoncé du 7 au 10 avril 2022
Art Paris Art Fair, après son édition de septembre en 2021, revient du 7 au 10 avril au Grand Palais Ephémère, en annonçant déjà 130 galeries (dont une partie dédiées au design) d’une vingtaine de pays. Cette année, un accent particulier sera mis sur les nouvelles approches de l’art centrées sur les relations au monde du vivant, à travers deux thématiques complémentaires, Histoires naturelles et Art & environnement. Elles seront associées à une démarche d’écoconception de la foire, une première dans le monde des salons d’art.

Wanted Design : annoncé du 15 au 17 mai 2022
Pour le moment, le salon new-yorkais Wanted Design, organisé au Jacob K. Javits Convention Center dans le quartier de Manhattan, se tiendra comme annoncé du 15 au 17 mai 2022. À noter que pour cette édition, le salon ICFF (International Contemporary Furniture Fair) sera également présent aux mêmes dates.

Salon du meuble de Milan : reporté du 7 au 12 juin
Les rumeurs des dernières semaines viennent d’être confirmées : la 60e édition du Salon du meuble de Milan (Salone del Mobile) qui devait se tenir du 5 au 10 avril a finalement bel et bien été décalée du 7 au 12 juin 2022. Comme l’a précisé Maria Porro, présidente du Salon, cette 60e édition devrait être fortement axée sur le thème de la durabilité.

Révélations : annoncé du 9 au 12 juin 2022
Annulé l’an passé, le salon Révélations – ou Biennale Internationale Métiers d’art et Création – est prévu du 9 au 12 juin au Grand Palais Ephémère. Créée par Ateliers d’Art de France, cette biennale est devenue un rendez-vous important de la création française et internationale pour y découvrir des œuvres inédites, mettre en lumière les savoir-faire des pays invités, et une occasion de rencontres entre professionnels, collectionneurs et amateurs éclairés.

Stockholm Furniture & Light Fair : reporté du 6 au 9 septembre 2022
Initialement prévu du 8 au 12 février, le salon scandinave a été reporté en raison de la crise sanitaire du 6 au 9 septembre. Pour les plus impatients, il sera tout de même possible de découvrir les marques de design nordiques en visitant showrooms et boutiques à l’occasion de la Stockholm Design Week qui elle est maintenue 7 au 13 février.

IMM Cologne : Edition 2022 annulée
L’édition 2021 du salon de Cologne avait été annulée en raison de la crise pour un report en physique du 19 au 23 janvier 2022… qui a elle-même été annulée. Les prochaines dates annoncées sont du 16 au 21 janvier 2023.

Les inscriptions pour participer à la 9e édition du concours de design Gainerie 91 sont ouvertes jusqu’au 28 mars 2022. Le thème de cette année s’intitule « Les bibelots du luxe »et demande aux participants de créer un gift original.
Le concours Gainerie 91 revient pour une 9e édition sur le thème des « Bibelots du luxe » et plus particulièrement sur les gifts, ces petit objets ou attentions remis gratuitement dans un but marketing. Véritables témoins de l’univers d’une marque, ils sont aujourd’hui au cœur de toute stratégie de communication et sont le meilleur moyen pour retenir l’attention. Ainsi, les candidats doivent se glisser dans la peau d’une marque de luxe et imaginer un gift original. Les secteurs d’activités concernés pour le concours sont : la joaillerie, l’horlogerie, les vins & spiritueux, la parfumerie, les cosmétiques, la petite maroquinerie. Les maquettes et prototypes seront évidemment appréciés par le jury.
Conditions de participation
Pour participer au concours, les candidats doivent être majeurs avec un statut d’étudiant ou avoir été diplômé depuis moins d’un an et résider en France. Aussi, ils ne doivent pas avoir participé directement ou indirectement à l’organisation du concours ou avoir travaillé pour Gainerie 91 par quelque biais que ce soit (stages, alternance, apprentissage, salariés, partenaires directs).
1er prix : 2500 € ou au choix, un lot de valeur équivalente et la mise en production de sa proposition avec 1 an de suivi par Gainerie 91.
2nd prix : 1500 € ou un lot de valeur équivalente au choix.
3e prix : 1000€ ou un lot de valeur équivalente, au choix.
Prix du Public : 800€ ou un lot équivalent, au choix.
Concours Gainerie 91 : les dates à retenir
28 mars 2022 : limite de dépôt des candidatures
4 avril au 30 mai 2022 : votes en ligne et sur Instagram pour le prix du public
28 avril 2022 : Présélection des 10 meilleurs projets
19 mai 2022 : Présentation des projets devant un jury et sélection des 3 meilleurs projets à l’issue de cette journée.
16 juin 2022 : Remise des prix
Pour plus d’informations, rendez-vous sur le site officiel du concours : https://concoursdesign.gainerie91.com

Pour ceux qui n’ont pas eu l’occasion de la visiter, découvrez en images la chambre de Chromosaturation qui anime le Pavillon français depuis mi-décembre jusqu’au 14 janvier, dans le cadre de l’exposition universelle Dubai 2020. Une sublime immersion dans la couleur.
Présenté au sein de l’exposition temporaire « Lumière, Lumières », accueillie au pavillon français de l’exposition universelle de Dubaï 2020, Chromosaturation est un environnement lumineux plaçant la couleur pure au cœur de son dispositif. L’installation, composée de trois chambres de couleur (une rouge, une verte, une bleue) baignant le visiteur dans une situation monochrome absolue, reprend de manière particulièrement immersive les expérimentations autour de la couleur du plasticien Carlos Cruz-Diez, grand penseur du courant cinétique.
Alors que notre vision est généralement habituée à percevoir simultanément d’amples gammes colorées, l’expérience pure de la couleur de Chromosaturation cajole autant qu’elle trouble la rétine. Fidèle aux principes de l’art cinétique, où le mouvement et le déplacement du spectateur participent directement à l’œuvre par effets optiques, Chromosaturation procède également de son interaction avec le mouvement des spectateurs qui génère sa mutation constante.
Dans ses œuvres, Cruz-Diez évoquait cette couleur qui « apparaît et disparaît au fil du dialogue qui s’établit entre l’espace et le temps réel ». En s’offrant au regard du public dans toute son épure physique, Chromosaturation rappelle cette « vision élémentaire » de la couleur, dépourvue de significations préétablies, et à travers laquelle Cruz-Diez pensait pouvoir « réveiller d’autres mécanismes d’appréhension sensible, plus subtiles et complexes que ceux imposés par le conditionnement culturel et l’information de masse des sociétés contemporaines. »
La chambre de Chromosaturation © Copyright 2022
Atelier Cruz-Diez Pavillon français Dubai 2020

La Villa Noailles organise depuis 2016 la Design Parade de Toulon, petite sœur de celle de Hyères qui fête cette année ses 15 ans. Respectivement centrés sur l’architecture intérieur et le design, ces deux domaines se côtoient dans ce festival qui avait cette année une saveur toute particulière. Après l’annulation de l’édition 2020, il était tant de retrouver les créateurs et partager avec les visiteurs ce qu’est le design d’aujourd’hui et ce que sera peut-être celui de demain. Le jury composé de 10 personnalités, était cette année présidé par Karl Fournier et Olivier Marty, fondateurs du Studio KO.
Henri Frachon : Mention spéciale du jury (Hyères)
Diplômé de l’Ecole nationale supérieure de création industrielle (ENSCI), Henri Frachon possède aussi un bagage d’ingénieur et de physicien obtenu respectivement aux Arts et Métiers et à l’Université Claude Bernard de Lyon. Le designer, déjà lauréat des Audi Talents 2020, conçoit le design contemporain comme un ensemble de facteurs complémentaires. À la fois inventif, intemporel et pratique, il n’exclut pas une approche sensible offrant rythme, justesse mais aussi dissonance. À travers ses conceptions percées de trous et dépourvues de leurs fonctions classiques, Henri Frachon s’est focalisé sur l’essence même de cette absence de matière. « J’ai interrogé ce que sont formellement les trous, ce qui les caractérise, ce qu’ils apportent, ce qui les rend beaux ». Un projet qui laisse donc voir bien plus loin que la surface en elle-même.

Arthur Donald Bouillé : Prix du public (Hyères)
Après avoir débuté son cursus avec un Bachelor de Design Industriel à l’Ecole nationale supérieure des arts visuels de Bruxelles, Arthur Donald Bouillé a obtenu un master en création industrielle à l’Ecole nationale supérieure de création industrielle à Paris. Médaillé il y a quelques années au concours annuel organisé par le MIT à Boston pour le développement d’un purificateur d’air intérieur, le designer porte depuis un intérêt plus profond à « l’exploration des mécanismes et des stratégies du Vivant ainsi que les questionnements éthiques ou écologiques qu’elles suggèrent ». C’est ainsi que l’échange avec des chercheurs a pris une place de choix dans son processus créatif pour proposer « de nouvelles manières d’envisager notre relation aux vivants et aux technologies ». Une évidence pour celui qui transforme les frontières en zones de rencontres inter-disciplinaires/environnementales/conceptuelles. Au travers de son projet récompensé par le festival, le designer souhaitait « interroger les manières de prendre soin et d’accompagner les malades du cancer par l’intermédiaire d’objets transitionnels, de supports de projection qui permettent d’extérioriser, de mettre à distance un fragment de la maladie ». Un projet qui, grâce à l’implication de la recherche scientifique et philosophique, peut se qualifier de thérapeutique et transitionnel selon les dires du créateur.

Johanna Seelemann : Mention Spéciale Eyes On Talents X Frame (Hyères)
Née en Allemagne, Johanna Seeleman développe ses « fascinations » durant sa licence en conception de produits à l’Académie des Arts d’Islande puis son master en design contextuel à la Design Academy of Eindhoven au Pays-Bas. Une fascination globale qui a conduit la designer à prendre la parole lors de conférences et d’événements comme la Deutsh Design Week, à s’exposer à Londres, mais aussi de nombreux pays nordiques. Mais celle qui en 2019 a été séléctionnée pour le « ICON Design – 100 Talents to Watch », n’avait jamais remporté de prix avant celui de la Villa Noailles. Particulièrement intéressée par « l’exploration de produits et de matériau qui semble banal en Europe », la designer « aime dénicher des parcours et des contextes cachés et proposer des scénarii alternatifs ou des futurs possibles ». La sensibilité de Johanna Seelemann envers les matériaux et leurs impacts dans une société pourtant sensible à la cause environnementale l’amène à se questionner sur la « possible adaptation de nos systèmes et l’utilisation des ressources au changements constants des goûts. »
Terra Incognita vise ainsi à placer la plasticine (un argile de prototypage) au centre du matériau. « En design on dit que la forme suit la fonction, mais elle suit aussi la mode et les tendances. » Ce nouveau médium offrirait donc la possibilité de remodeler l’objet à l’infini. Un projet esthétique et évolutif en somme !


Cecile Canel & Jacques Averna : Grand prix du jury (Hyères)
Lauréats de la résidence « sur mesure + » de l’Institut français et résidents aux Ateliers de Paris, Cécile Canel et Jacques Averna ont exposé leur création mêlant dynamisme et mécanisme à la Design Parade de Hyères. Sortis tous deux de l’ENSCI les Ateliers, et préalablement diplômés respectivement aux Beaux-Arts de Toulouse et à l’Ecole Boulle, ces deux designers adhèrent à un design qui « vient se frotter à des réalités techniques, matérielles et sociales, tout en gardant élégance et astuce ! ». C’est ainsi que ce duo s’est intéressé aux enseignes de magasins « responsables de beaucoup de pollution lumineuse et de consommation énergétique». Pour y remédier avec élégance et astuce, les designers ont saisis la force du vent pour animer aux grès de ses courants ces repères du quotidien.


Anna Talec & Julie Brugier : Mention Spéciale du jury (Toulon)
Anna Talec et Julie Brugier sont toutes les deux diplômées d’un DSAA, spécialisées respectivement en mode et environnement à l’école Duperré de Paris, et en design d’objet à l’école Boulle de Paris. Ancrées dans l’idée que l’approche contextuelle est désormais devenue inévitable, les deux créatrices font des différents facteurs d’un lieu, un ensemble d’éléments à prendre en compte. « Nos projets s’ancrent toujours dans des territoires emplis de savoir-faire », leurs permettant de revendiquer « un design sobre et vivant ». Premier appel à projet réalisé par le binôme, la thématique leur a permis de mettre en avant une plante attachée au territoire méditerranéen : le chanvre. Écologique, les designers l’ont donc transformée en objet domestique au sein de leur espace appelé la Villa du cueilleur. Un appentis qui, avec sa charpente en bois et ses fonctionnalités primaires, offre un résultat « frugal » selon les créatrices.


Clemence Plumelet & Geoffrey Pascal : Prix Mobilier national (Toulon)
Pour ces deux diplômés de la Design Academy of Eindhoven au Pays-Bas, ce prix est le premier remporté. Avec leur vision du design contemporain basé sur l’échange des savoirs-faire et des souvenirs générationnels, les deux jeunes designers ont abordé la thématique méditerranéenne selon plusieurs angles au gré de leurs rencontres. « La Méditerranée et son atmosphère chaleureuse et chaloupée […] se décline en un projet que nous avons voulu riche de couleurs saturées et de matières sophistiquées ». Mais de voyage en rencontres, le projet s’est enrichi pour pencher vers « des matériaux plus justes, en accord avec l’atmosphère qui réside sur le littoral ». Au final, le projet s’articule autour d’un espace remplissant la fonction de salon-bar. L’évocation d’un bord de piscine où entrent en discussion le lieu et les objets l’animant. Le résultat d’une collaboration dont les inspirations tant cinématographiques (La piscine de Jacques Derray) que photographiques (les clichés de Slim Aarons) signent un espace à l’allure ludique et au style intemporel selon les créateurs.

Edgar Jayet & Victor Fleury Ponsin : Grand prix Design Parade Van Cleef & Arpels + Mention Speciale Eyes On Talents X Frame (Toulon)
« Dans la pénombre, on sent ce vent, tout dans cette pièce respire, on peut se laisser aller à une sieste », tel est décrit le projet par ses créateurs, tous deux étudiants à l’école Camondo de Paris. Si pour Edgar Jayet, le design doit principalement passer par les sensations et la transdisciplinarité, Victor Fleury Ponsin fait pour sa part place au dialogue inter-créatif et à la compréhension propres à chaque matériaux. Deux approches complémentaires du design contemporain qui ont permis aux jeunes primés de créer « un projet autour de souvenirs et de sensations ». La sieste, institution méditerraéenne, se mue ici en un espace travaillé. « Notre pièce est habitée par l’ombre et traversée par le vent ». C’est ainsi que la pierre humidifiée, le plâtre et un voilage suffisent à créer un lieu hors de l’éblouissement et de la chaleur. La sieste, une habitude de vie matérialisée en un espace où les longs et chauds après-midis s’atténuent dans le calme d’un repos.


Marc-Antoine Biehler & Amaury Graveleine : Prix Visual Merchandising (décerné par Chanel) et Prix du public (Toulon)
« Questionner l’existant, écouter l’histoire d’un besoin, s’ancrer et s’adapter dans un lieu de façon la plus naturelle possible ». C’est ainsi que résonne le design d’aujourd’hui pour Marc-Antoine Bielher et Amaury Graveleine. Diplômés d’architecture d’intérieure et design d’objet à l’école Camondo de Paris pour le premier, et d’architecture d’intérieure et design d’espace à l’Ecole Boulle de Paris pour le second, la localité des savoirs et des matériaux représente pour eux une réponse aux besoins. C’est donc de fait que « la beauté du geste artisanal offre une réponse architecturale plus humaine ». Si la Méditerranée est une évocation du bord de mer, le duo a pour sa part choisi de s’inscrire dans les terres. Souvenirs de vacances qui leur sont propres, issus tantôt de moments partagés ? Entre amis ou en famille, tantôt des lectures de Pagnol ou encore de films, un projet est né mêlant liberté et insouciance des moments vécus enfant. Un projet où parasol et table en marqueterie de noyaux d’olives rappellent cette ambiance provençale avec humour.



Au Carreau du Temple, AKAA Also Known As Africa signait en novembre dernier une édition du renouveau en exposant le meilleur et le futur de la scène contemporaine du continent africain et de sa diaspora, aux thématiques actuelles.
Comme un signe de la présence grandissante de la création africaine à l’internationale, Akaa 2021 revenait au moment où les enseignes Marianne Ibrahim et Cécile Fakhoury, dédiées à ce marché, s’implantaient à Paris. Après un an d’absence, le salon rassemblait 34 galeries, dont huit nouvelles et exposait 133 artistes. Au sein de son espace Rencontres, une carte blanche avait été confiée à Aristote Mago, brodant sur des sacs en lin de mystérieux personnages. Ses pièces aux propos à la fois personnels et économiques dialoguaient avec celles, oniriques, de la jeune Tiffanie Delune. Le centre de la foire était également investi d’une pièce monumentale textile, chargée de sens, de Morné Visagie.


Côté grandes galeries françaises, on retrouvait chez Magnin-A de chatoyants tableaux de Chéri Samba, tandis que Georges-Philippe & Nathalie Vallois, entre autres, proposaient des céramiques design de King Houndekpinkou, ou encore des sculptures-fétiches à clous version 2021, de Franck Zannou, dit ZanFanhouede. Quant à Anne de Villepoix, elle révélait quelques-uns des tableaux très verdoyants et poétiques de Leslie Amine ou Souleimane Barry.


À travers la photographie, cette scène se révèlait toujours aussi pointue et ambitieuse. Notre coup de cœur va à Gosette Lubondo, Prix Maison Ruinart 2021, dont les œuvres étaient aussi visibles sur le salon Paris-Photo. Chez Angalia, ses tirages de 2016 évoquaient la mémoire et ses fantômes, à travers des jeux de reflets et de couleurs. De nombreux portraits comme ceux de Saïdou Dicko ou Justin Dingwall chez ArtCo, de Bruno Cattani chez Vision Quest4 Rosso ou encore ceux d’Angèle Etoundi Essamba, chez Carole Kvanesvki, illustrent l’usage fréquent et sublimé de ce médium. Le fonds de dotation Ellipseartprojects était également présent à travers des épreuves d’Ibrahima Ndomi, lauréat 2021 du prix éponyme et membre du collectif sénégalais atelier Ndokette.

Au-delà de leur beauté plastique souvent flamboyante, les œuvres exposées parlaient d’identité, de métissage, de discriminations, comme de la violence de l’histoire, du politique, des religions et de l’environnement. En 2021, Akaa reste le meilleur baromètre de l’art africain actuel, confirmé et prospectif.

Mi-novembre, la troisième ville espagnole fêtait le lancement officiel de sa programmation 2022 en tant que Capitale mondiale du design, lors d’une soirée d’ouverture au Palais des Arts Reine Sofía. Si l’ensemble des projets ne sont pas encore précisés, les grandes lignes esquissées et la chronologie des événements annoncés montrent une volonté de valoriser le maillage des acteurs dans le territoire, de l’ouvrir au grand public, mais aussi d’être un vrai centre d’échanges pour les professionnels.
Plus de 100 activités, 150 intervenants de haut niveau, 70 accords de collaboration, 25 lieux et près de 100 entités impliquées composent l’agenda de Valencia, World Design Capitale 2022. Autour d’enjeux de développement, avec le design comme moyen de transformation.
Un programme structuré autour de temps forts appelés Signatures
Le programme est en conjonction de différents événements : les événements habituels, comme le Salon Cevisama en février, adaptent une partie de leur contenu à ce statut de Capitale mondiale en ajoutant des expositions spécifiques et en mettant l’accent sur les rencontres de professionnels. Parallèlement, des opérations ont été montées de façon à être pérennes : une Map Design est ainsi proposée, identifiant dans la ville des lieux pour leur architecture, leur architecture d’intérieur, des showrooms, des boutiques particulières, des agences…, comme un parcours multiple suggéré dans Valence. Plus spécifiquement, pour valoriser un savoir-faire local autour de la céramique, une appli sera lancée autour du projet NollaMap, du nom de cette maison ancienne, pour sauvegarder son savoir-faire d’excellence. Il s’agit de repérer les lieux comportant ces sols en mosaïque. Ils sont notamment présents dans de nombreuses habitations de la ville, voire dans des institutions, comme on peut le constater à l’hôtel de ville. L’année sera marquée par sept événements dits Signatures coorganisés avec la World Design Organization. L’objectif est d’attirer environ 130 000 visiteurs en 2022 et plus de 100 intervenants internationaux de haut niveau. Ils se tiendront au second semestre, en point d’orgue de la manifestation, afin de démontrer l’importance et la reconnaissance du design comme outil clé pour améliorer le développement économique, social, culturel et environnemental des territoires.
Ainsi, au mois de juin, le quartier de La Marina vibrera au rythme du festival World Design Experience : cet événement interrogera la recherche de la meilleure expérience utilisateur. Il proposera, autour de concerts, d’échanges, d’expositions, une mise en avant de la force de la communauté en design graphique qui porte la ville depuis des décennies. Et il fera également la part belle aux œuvres numériques. Des professionnels internationaux sont attendus pour des échanges et des master class dont, notamment, Caterina Bianchini, Brian Collins, Alex Trochut, Alex Hunting, Liza Enebeis, Rebeka Arce, Yarza Twins, Thomas Kurppa et David Navarro. Le 23 septembre, le centre d’art Bombas Gens accueillera le World Design Exchange, une rencontre entre les managers et les organisateurs de certaines des Semaines mondiales du design – de Stockholm à Berlin et de Lima à Chengdu – et d’autres événements similaires. Ce forum réunira des représentants du design des cinq continents pour en discuter d’un point de vue global, créatif et social ; des études de cas, les connaissances acquises et les défis seront partagés au travers de sessions d’ateliers et de réseautage.

Le design comme outils de politique
Parallèlement, le World Design Street Festival, du 19 au 25 septembre, sera la célébration de la Capitale mondiale du design Valence 2022 dans les rues et le départ de la Feria Hábitat València. Son calendrier d’activités se déroulera dans toute la ville et dans l’ancien lit du fleuve Turia, et sera axé sur la créativité et la promotion de ses professionnels au travers d’expositions, de conférences, d’ateliers, d’itinéraires et d’initiatives qui relieront le design à des domaines tels que la gastronomie. Le Street Festival permettra aux gens de rencontrer des éléments de design par hasard dans des contextes quotidiens pour provoquer une réflexion spontanée sur le vrai sens de leur conception.


Les 3 et 4 novembre 2022, le Palais des congrès de Valence accueillera la World Design Policy Conference, qui réunira, elle, des personnalités telles qu’Ezio Manzini, Brandon Gien, Alok Nandi, Leyla Acaroglu, René Spitz, Anna Whicher, Päivi Tahkokallio, Gisele Raulik Murphy et Brigitte Borja de Mozota. Son objectif sera de fournir une plateforme mondiale pour l’échange d’idées et de meilleures pratiques de différents pays, régions et villes qui activent, développent et maintiennent une politique de conception efficace. La conférence sera représentée par la Commission européenne et le New European Bauhaus et mettra en évidence la pertinence sociale, pour les entreprises, organisations et institutions de premier plan, de l’intégration du design dans les stratégies d’entreprise et de croissance. La cérémonie de remise des diplômes du monde du design aura lieu le 3 novembre. Un événement pour faire le bilan, révéler les premiers résultats de l’étude d’impact, réfléchir sur l’héritage de World Design Capital Valencia 2022 et remettre officiellement le titre de World Design Capital aux deux villes, San Diego et Tijuana, qui se le partageront en 2024.

Au cours de l’avant-dernier mois de l’année aura lieu le World Design Cities Meeting. Un forum mondial des Capitales mondiales du design où, à partir de la participation et du regard de ses représentants institutionnels, il sera l’occasion de générer des synergies et des rencontres entre ses dirigeants et ses principaux promoteurs. Le cycle Signature Events viendra parachever la commémoration de la Capitale avec la présentation du World Design Spotlight, conçu pour promouvoir les talents locaux – Valence est le berceau de nombreux lauréats des National Design Awards – et dirigé par Marisa Gallén. Cette activité, en effet, se développera tout au long de l’année et se terminera fin 2022 en ayant rendu hommage à la communauté du design à travers 52 professionnels qui en seront les protagonistes semaine après semaine.

C’était l’une des foires très attendues de cet automne 2021. Du 20 au 24 octobre dernier, Paris Internationale avait fait son grand retour pour une 7e édition remarquée. Pendant 5 jours, pas moins de 35 galeries venues de 21 pays différents ont été exposées dans un hôtel particulier du XVIe arrondissement.
Si le grand raout du marché de l’art contemporain à Paris s’était fini en beauté avec l’annonce des bons résultats de la Fiac, la foire Paris Internationale s’était démarquée par son engagement toujours plus prégnant pour la création émergente, et son retour dans un hôtel particulier qui fait, depuis 2015, sa signature.


Après les espaces vacants d’un supermarché parisien en 2020, la foire avait retrouvé les moulures et papiers peints –dans leur jus– d’un hôtel du XIXe siècle, sis 186 avenue Victor Hugo, dans le XVI arrondissement, où 35 galeries de plus de 21 pays ont occupé les étages. Tenant ses promesses de découvertes et soutien aux artistes émergents, cette nouvelle édition présentait aussi des scènes trop rares sur le marché français. En témoignait la galerie Blitz de La Valette proposant des pièces du plasticien maltais Pierre Portelli, dans la cuisine du premier étage. Remarqué à la Biennale du Design de Saint-Etienne en 2008, celui-ci exposait ici The Blue Garden, rideau aux motifs de roses bleues résultant d’une hybridation génétique et de mouches venant interrompre l’image idyllique, mais aussi Homecoming, évoquant le tatouage. En remplaçant l’encre par des couverts de cuisine et la peau par le bois des tables, Portelli traduisait « les sentiments humains en un mélange tangible de matériaux quotidiens et artistiques », selon la galerie. Au deuxième niveau, l’enseigne française Crèvecœur faisait son show avec les peintures murales géométriques très vitaminées et les personnages-animaux à l’expression ambivalente de l’artiste engagée argentine, Ad Minoliti.


Parmi d’autres encore, le public avait pu découvrir les œuvres des lauréats et lauréates de la Bourse Révélations Emerige, présentées à l’étage supérieur. We are volcanoes de Loucia Carlier évoquait d’inquiétants objets en vitrines, telles des ruines archéologiques du futur, tandis que la vidéo poétique de Linda Sanchez présentait la course sur le fil d’une goutte d’eau. Non loin, chez le Néerlandais Wilfried Lentz, de facétieux sneakers flasques, en céramique, de l’Américain Michel Portnoy semblaient contester leur marchandisation excessive. Enfin, le continent africain avait trouvé une de ses plus belles expressions au quatrième étage, à travers les œuvres graphiques, entre tradition du faire et nouvelles technologies, de l’artiste sénégalais Mbaye Diop, à la galerie-résidence Selebe Yoon de Dakar. Dirigée par Silvia Ammon, cette foire décidément alternative compte toujours plus dans le paysage de l’art contemporain.



En septembre, entre talks, café, concept store, Intramuros s’installait avec ses partenaires à la Galerie Joseph, au cœur de la Paris Design Week Factory. Un lieu vivement plébiscité par le public !
Du 8 au 12 septembre, Intramuros a animé au sein de la Galerie Jospeh, rue de Turenne, un espace café et un concept store, dans une scénographie réalisée par Sandra Biaggi. Le public a ainsi découvert une sélection de produits de la rédaction, en se régalant des plats et desserts concoctés par le restaurant partenaire Sezono. Un projet possible grâce à l’implication des partenaires Vitra, IVC Commercial, Cruso, JVD, Mobilier national, Minuit Céramique, Bang & Olufsen, Formel Studio, Élise Fouin, Lucile Viaud, Néolithique… Des œuvres des artistes Wai Ming et Tiffany Bouelle étaient également exposées.

L’Intramuros Café a été aussi le lieu central d’une dizaine de talks filmés, auxquels le public pouvait assister dans la limite des places disponibles. Portant sur des sujets aussi divers que la jeune création, la RSE, les biomatériaux, le luxe et l’innovation durable… le programme réunissait des professionnels du design et différents experts autour de la création durable et désirable, thème de cette édition de la Paris Design Week. Toutes les vidéos des talks sont consultables ici.






Un public très présent
Du 8 au 12 septembre, 4436 personnes ont visité cet espace rue de Turenne, avec un moment fort, lors de la soirée du samedi 11 septembre, qui a réuni quelque 650 personnes. Retrouvez ce temps fort en images.











Toute l’équipe d’Intramuros remercie vivement les partenaires, les intervenants, et le public, qui ont fait de cet événement une véritable réussite !
RETROUVEZ L’INTRAMUROS CAFÉ du 20 au 24 janvier à Maison & Objet, HALL 7, stand F20.






Du 26 novembre au 5 décembre, les œuvres du duo Antoine Lecharny et Henri Frachon, de Marie-Sarah Adenis et de Charlie Aubry, lauréats du concours Audi talents 2021, sont exposées au Palais de Tokyo. Organisée par le commissaire Gaël Charbau, l’exposition « Mind Map » allie quête du vivant, réalité virtuelle, intelligence artificielle et design abstrait.
Depuis 2007, le prix Audi Talents accompagne des jeunes créateurs (artistes et designers) dans la réalisation d’un projet. Inspiré du concept du Mindmaping (« carte mentale » en français), qui désigne une représentation graphique des différents chemins de la pensée, le nom de l’exposition « Mind Map » fait justement référence aux différents chemins et visions que peuvent prendre une réflexion, un concept ou un principe.
Henri Frachon et Antoine Lecharny : l’abstraction réfléchie
Seul duo parmi les lauréats, Henri Frachon et Antoine Lecharny sont les instigateurs de Abstract Design Manifesto. Un travail de recherche sur le design abstrait exposé à travers une sélection de 56 objets. Leur répartition en 4 rangées symbolise les 4 axes de recherche sur lesquels ils ont basé cette démarche créative : le trou, le triangle, la dissonance et le jonc doucine (seule technique d’assemblage par le repoussage). Dans leur démarche, ils ont cherché à définir ce qui permettait d’obtenir un trou ou un triangle par exemple, ce qui n’en faisait pas un, quels procédés permettaient d’en créer… L’axe de la dissonance a également créé des questionnements car le concept reste très large, et il a souvent été question de définir ce qui est dissonant et ce qui ne l’est pas, selon eux. Concernant la jonc doucine, le procédé très technique a offert des possibilités de travail intéressants.

© Thomas Lannes
Ils décrivent leur travail comme une expérimentation du design consistant à sortir de l’usage propre de l’objet. Tous les objets exposés n’ont effectivement pas vocation à avoir une utilité, ils sont simplement esthétiques et sont la réponse à des questions bien précises. « Nous partons d’un de ces 4 principes, nous nous posons des questions, élaborons des propositions de réponses et essayons ensuite de définir ses limites. Ce qu’on souhaite c’est faire ressortir l’essence même de l’objet. » Pour autant, ils insistent sur le fait que tous les objets sont des produits finis et n’ont plus vocation à être modifiés.

© Fabien Breuil

Un rendu qui a fait appel à différents savoirs-faire : taille de pierre, broderie, charpenterie, repoussage sur métal… De fait, la moitié des réalisations exposées ont été réalisées par les artistes eux-même, tandis que l’autre partie a été co-réalisée avec des artisans qualifiés, notamment pour le principe de jonc de doucine, qui est un savoir-faire très technique et peu répandu en France.
Marie-Sarah Adenis : quand biologie et formes ne tiennent qu’à un fil
Passionnée par la quête du vivant et le monde des sciences, Marie-Sarah Adenis présente Ce qui tient à un fil, une installation aux visions croisées entre biologie, technologies, philosophie et sociologie. « J’essaye de trouver et créer des formes qui portent le récit de ce que j’ai envie de raconter ». Passionnée par les liens de parenté entre les êtres vivants et l’ADN, elle tente de faire valoir une réflexion collective à travers les installations suspendues, celles présentent au sol et à travers les casques de réalité virtuelle mis à disposition.


© Thomas Lannes
Charlie Aubry : montre-moi ce que tu portes, Internet trouvera ta prochaine tenue
Le projet P3.450 de Charlie Aubry est le résultat d’une réflexion sur l’impact de l’intelligence artificielle, du partage des données et du questionnement autour de celles-ci. À l’ère des réseaux sociaux, des cookies et des tendances Internet, Charlie Aubry interroge les comportements sur internet. Une installation imposante, interactive : elle dissimule des capteurs vidéo programmés pour reconnaître et analyser les vêtements portés par les visiteurs. Les données retenues sont ensuite envoyées vers YouTube qui propose instantanément sur les nombreux écrans composant l’installation, des vidéos en lien avec le vestimentaire. L’artiste souhaite ainsi ouvrir une réflexion sur nos modes de consommation et la sollicitation permanente d’internet de proposer des contenus en lien avec nos habitudes et intérêts.

© Thomas Lannes

Depuis 2015, l’association Matières Libres organise un concours récompensant de jeunes diplômés ou autodidactes en arts appliqués ou métiers d’art. Les lauréats de l’édition 2021 viennent d’être dévoilés.
Lancée en décembre 2015 par le créateur Mathias, l’Association Matières Libres a pour objectif d’aider des jeunes sortant d’écoles des métiers d’art, des arts appliqués ou autodidactes, dans ce passage si difficile d’entrée dans la vie professionnelle. Chaque année, un concours est ouvert à tous les moins de 30 ans sortant d’écoles d’Arts appliqués (Boulle, Duperré, Estienne, Olivier de Serres … ) ou autodidactes. Il récompense des jeunes pour leur originalité, leur savoir- faire et leur liberté créative.
Les lauréats 2021
Pour cette 4e édition, deux lauréates ont été récompensées du Prix Mathias 2021 et ont reçu une dotation financière de 5000 euros.

– Eve George , co-fondatrice de l’Atelier George pour sa création intitulée Vagues
C’est une composition de 63 carreaux de verre coloré fusionné. Chaque élément est façonné manuellement et donc différent du suivant. Eve George a développé cette technique lors de sa formation au CERFAV. Cette création a nécessité 40 heures de travail.


– Nina Fradet, ébéniste, pour son œuvre Awaseru
Fascinée par l’art japonais du tressage de bambou (takezaiku), la créatrice a cherché à transposer cette technique sur du bois massif pour la conception d’une assise stylisée. Ce projet a nécessité 200 heures de travail.

Les lauréates ont été récompensées le 15 novembre dernier à l’Hôtel de l’Industrie à Paris. Au-delà de la remise des prix, Matières Libres assure un certain suivi des lauréats, que ce soit par leur promotion lors d’expositions dans des salons professionnels, une communication sur les réseaux sociaux… ou le conseil dans leurs premières commandes.

Depuis 2012, le prix Paris Shop & Design récompense les meilleures réalisations d’aménagement intérieur de commerces, d’hôtels, restaurants, lieux culturels. Présidé cette année par le designer Patrick Jouin, le jury a sélectionné en octobre un lauréat dans les 6 catégories en lice : Alimentaire ; Bien-être, Santé, Beauté ; Culture, Loisirs, Services aux particuliers ; Hôtels, Cafés, Restaurants ; Maison, Décoration et Mode. Intramuros est partenaire de ce prix.
Au terme de plusieurs étapes de sélection, ce sont finalement les projets de 18 finalistes qui ont été présentés au jury pour les 6 lauréats 2021 du Prix Paris Shop & Design. La Chambre de commerce et d’industrie de Paris (CCI Paris) a réuni des experts de l’architecture d’intérieur, du design, de l’architecture, du commerce et du tourisme pour faire leur choix. Les débats ont notamment porté sur le caractère innovant du projet, la cohérence entre l’aménagement livré et les objectifs de l’activités, la dimension esthétique, l’exploitation, de espace, l’ergonomie, l’expérience proposée, l’accessibilité… L’idée étant de récompenser des lieux favorisant l’attractivité de Paris.
ALIMENTAIRE / Lauréats : Boutique Patrick ROGER / Pascal GRASSO (architecte)
Une nouvelle fois, une boutique Patrick Roger a été distinguée par ce prix, chacun des projets étant uniques. Aménagée par l’architecte Pascal Grasso, cette nouvelle boutique située dans le 6e arrondissement de Paris rue de Sèvres, propose à ses visiteurs une expérience inédite, où le magasin de chocolats se confond en galerie d’art : « L’inclusion de l’art dans un espace commercial permet vraiment de donner une expérience immersive nouvelle. Ce prix célèbre ma collaboration avec Patrick Roger et la démarche de sortir des codes habituels de lieux de vente » confie Pascal Grasso. Couleurs sombres et mobilier singulier, l’architecte a pensé une boutique aux allures végétales, laissant penser à une forêt.
BIEN-ETRE, SANTE, BEAUTE / Lauréats : parfumerie Maison GOUTAL Paris / Studio Démodé
Parfumerie et cosmétiques implantée dans le marché du luxe, GOUTAL Paris dévoile à travers cette boutique située rue De Bellechasse, un lieu aux airs poétiques et naturels. Pensée par le studio Démodé, la boutique aux touches dorées et intimistes offre une découverte des produits singulière et très soignée. Ce petit espace a été repensé dans les codes initiaux de la parfumerie, un hommage simple et direct à la fondatrice de la marque : « C’est à cette adresse que la créatrice, Annick Goutal a démarré en 1981 à créer ses propres parfums. 40 ans après nous souhaitions redonner vie à ce cocon parisien chargé d’histoire » confie Anne Veyrard, directrice marketing de Goutal Paris.
CULTURE, LOISIRS, SERVICES AUX PARTICULIERS / Lauréats : La Chapelle XIV, Benjamin Belaga / Delphine Sauvaget
Dans le 18e arrondissement, galerie d’art et de design, disquaires vinyle et atelier d’impression sont réunis, au fond d’une cour, dans un lieu pluriel baptisé la Chapelle XIV. L’architecte d’intérieur Delphine Sauvaget a conçu l’aménagement décloisonné et ouvert, facilitant une circulation d’un espace à un autre tout en gardant l’esprit bien contemporain du lieu.
HOTELS, CAFES, RESTAURANTS / Lauréats : JO&JOE, Neel Tordo / Sandra Demuth et Caroline Bene-Combes (Architectes d’intérieur)
Avec ces 4 sites répartis en la France et en Autriche, JO&JOE ( groupe Accor) propose une nouvelle version de l’auberge de jeunesse, à vivre seuls, entre groupes d’amis ou famille nombreuse, et complètement inscrit dans la vie d’un quartier. Le site lauréat JO&JOE de Paris Nation a été aménagé et décoré par Sandra Demuth et Caroline Bene-Combes, toutes deux architectes d’intérieur, pour un résultat offrant des espaces communs colorés, avec notamment des fresques de street art, et des espaces de couchages (dortoir sou chambres privées) plus sobres. Une dimension design ancrée selon Neel Tordo : « Le Design est au cœur de Jo&Joe et tout particulièrement au sein de Jo&Joe Paris Nation : un lieu de rencontre à la fois chaleureux et décalé avec son design urbain. Ce prix est un succès partagé avec le studio d’architecture D+B Interior Design et le propriétaire Novaxia »
MODE ET DECORATION / Lauréats : Maurice & la Matelasserie, Elie Gamblin / Antoine Lesur et Marc Venot (designers)
Trouver son matelas n’a jamais été si confortable ! En designant la boutique Maurice & la Matelasserie située rue De la Fayette, Antoine Lesur et Marc Venot, proposent aux clients une immersion dans un lieu haut de gamme et intime. Le visiteur y retrouve 3 espaces répartis sur deux étages : le rez-de-chaussée, où sont situés la galerie lumineuse qui expose les matelas et l’atelier de confection de ces derniers, tandis que le 1er étage aux couleurs plus sombres et tamisées est dédié à l’échange pour y personnaliser et trouver le matelas parfait. Une expérience main dans la main, articulée et rendu possible par un travail de design soigné. « Nous sommes ravis d’avoir reçu ce prix pour la visibilité qu’il nous apporte, mais nous nous réjouissons surtout du fait qu’un tel concept, absolument singulier dans la vente de matelas, soit récompensé ! » confie Antoine Lesur.
MODE / Lauréats : Michel Vivien / Sophie Dries (architecte d’intérieur)
Les souliers y sont exposés comme des oeuvres sur les étagères en bois de cette boutique du Faubourg Saint-Honoré. Grands miroirs et appliques en verre soufflés habillent le lieu décoré et pensé par l’architecte d’intérieur Sophie Dries.
Un lieu imaginé et créé en équipe, dont le prix est une reconnaissance pour tous : « Ce prix est particulièrement important pour l’ensemble de l’équipe avec qui nous avons construit une relation durable et enrichissante : le curator de design Gilbert Kann et les artisans sans qui nos créations ne prendrais pas vie. » confie Sophie Dries.

Artiste et théoricien, Donatien Aubert s’intéresse à la cybernétique et à la façon dont elle continue d’influer sur les transformations actuelles des savoirs, des techniques, mais aussi des imaginaires, politiques, sociaux et culturels. Pour cela, il conçoit des installations hybrides (courts-métrages générés par ordinateur, mais aussi dispositifs interactifs et sculptures) qui font appel au design pour donner forme à ses recherches plastiques. Un processus que l’on peut découvrir en ce moment au CentQuatre, avec son installation Les jardins cybernétiques dans le cadre de l’exposition « Au-delà du Réel » de la Biennale Némo, et dont Donatien Aubert viendra confronter les finalités esthétiques avec les univers croisés de Philip K. Dick et Ridley Scott au cours du week-end thématique Blade Runner les 27 et 28 novembre prochains.
Au cœur du travail de Donatien Aubert, trône la cybernétique. Né outre-Atlantique au cours de la Seconde Guerre mondiale et réunissant des scientifiques issus de disciplines variées (analyse et traitement du signal, robotique, neurologie, psychologie comportementale), ce mouvement a marqué un tournant dans l’histoire des sciences en imbriquant enjeux techniques, scientifiques et industriels, au service de la création d’inventions militaires stratégiques. Avec lui, le scientifique et l’ingénieur ont connu un nouveau rapport de dépendance mutuelle qui a structuré l’idée de technosciences. Plus encore, la cybernétique a contribué à façonner les champs de la robotique, de l’informatique et de ce qu’allait devenir l’intelligence artificielle en construisant une vision organique de la machine. Appelée à fonctionner comme un cerveau humain – via l’ordinateur – ou à adopter des modes de fonctionnement s’inspirant de la biologie animale, la machine a ainsi pu mieux s’intégrer dans notre environnement quotidien pour le transformer. Par ce biais, les trajectoires de recherche ouvertes par la cybernétique ont déferlé sur nos modèles culturels, influençant la philosophie, la littérature, le cinéma ou les arts. Depuis, et comme le dit Donatien Aubert, « l’imaginaire des sociétés technologiquement développées est hanté par les figures de l’automate, du cyborg et du transhumain ».

Rendre lisibles la transformation des imaginaires
C’est dans ce creuset que Donatien Aubert inscrit son travail d’artiste et de théoricien. Il cherche à rendre lisibles ces évolutions en mettant en relief les transformations actuelles des savoirs, des techniques, mais aussi des imaginaires politiques, sociaux et culturels. Il crée pour cela des œuvres hybrides où se côtoient court-métrages d’animation, dispositifs interactifs, programmes de réalité virtuelle ou sculptures conçues et fabriquées avec l’assistance d’un ordinateur.

Une hybridité des supports à la conception et au design très élaborés, où les recherches plastiques s’appuient sur des ressorts perceptifs largement renforcés par les technologies numériques (design génératif, interactivité, immersion), mais qui sont aussi très respectueuses des formes.
Trilogie sur la cybernétique
En 2019, Donatien Aubert a ainsi réalisé l’installation Cybernetics: From 1942 Onwards. Mapping the Constitution of a New Empire, premier volet de sa trilogie sur la cybernétique, qui contextualisait le rôle joué par la cybernétique dans la réorientation des conflits (notamment pendant la guerre froide). Le public était invité à rentrer dans une pièce où étaient disposées six vitrines interactives, surmontée chacune d’une hélice holographique donnant l’illusion que des images solides et animées flottaient dans l’espace d’exposition. En s’approchant des hélices, les spectateurs activaient grâce à des tapis sensitifs la révélation du contenu des vitrines, normalement opaques en leur absence. S’y découvraient alors des images d’archives sérigraphiées sur métal (provenant d’archives militaires ou de représentations liées à l’imaginaire du cyborg), des écrans LCD diffusant des animations générées par ordinateur, et des impressions 3D. Des éléments qui entraient en résonance avec le film projeté dans la même salle, où pointaient quelques moments marquants de l’histoire des transferts entre la cybernétique et la prospective militaire américaine (du développement des arsenaux nucléaires au sein du projet Manhattan pendant la Seconde guerre mondiale à la plus récente circulation de l’imaginaire transhumaniste dans les institutions outre-Atlantique liées à la Défense). Si l’idée était de montrer qu’une part importante des imaginaires liés à la culture numérique a malheureusement des connotations militaristes, son rapport à la mise en scène du dispositif et à la fabrication de l’objet fascinait tout autant.

Des jardins cybernétiques à Blade Runner
Car quoi de plus normal, quand on s’intéresse comme lui à la fonctionnalisation du monde, que d’être attentif au design de l’objet et du dispositif ? C’est bien entendu encore le cas dans sa nouvelle installation et deuxième volet de sa trilogie, Les jardins cybernétiques, présentée au Centquatre dans le cadre de l’exposition Au-delà du Réel de la Biennale Némo, et qui traduit plutôt bien l’ambivalence toute cybernétique du rapport entre le vivant et la machine. On peut notamment y découvrir Disparues, un bouquet de fleurs réunissant cinq espèces végétales éteintes entre l’avènement de la révolution industrielle et le XXIe siècle, imprimées en 3D par frittage de poudre. Modélisé à partir d’estampes botaniques ou de photographies, ce bouquet donne selon Donatien Aubert, « une forme concrète, un peu morbide, aux phénomènes d’anxiété impliqués par l’érosion de la biodiversité – la solastalgie – par la crainte que l’environnement que nous connaîtrons sera plus dégradé qu’il ne l’est déjà ». Plus impressionnantes encore sont ses Chrysalides, des dispositifs électroniques abritant des végétaux et diffusant des sons de nature (pépiements d’oiseaux, chants d’insecte, bruit de l’eau ou du vent) en l’absence de visiteurs. Lorsque quelqu’un s’approche, ces bruits rassurants sont progressivement grignotés par une trame sonore électronique anxiogène. Mais paradoxalement, cette trame s’interrompt quand le visiteur se rapproche au plus près. Les Chrysalides diffusent alors de la musique. « L’industrie a contribué à détruire les milieux de nombreuses espèces vivantes », explique Donatien Aubert. « Mais, réciproquement des techniques relativement récentes telles que l’hydroponie, l’aéroponie et l’éventail complet des instruments de l’agroécologie nous autorisent aujourd’hui à faire croître des végétaux à des rendements jusqu’ici inégalés et de façon harmonieuse. Les caractéristiques formelles des Chrysalides renvoient à cette ambiguïté essentielle dans notre rapport toujours plus instrumental au monde et à l’environnement. »
Ce rapport ambigu se prolonge évidemment dans le court-métrage éponyme de l’installation, où l’ambivalence des rapports entre cybernétique et écologie transparaît aussi, par exemple lorsqu’on remonte à l’origine des données météorologiques, première source d‘information du changement climatique. « Les premières simulations climatiques ont été réalisées à partir d’un ordinateur de Stanford conçu par John von Neumann, l’une des figures principales de la cybernétique », explique Donatien Aubert. « Or, cet ordinateur n’avait pas été fabriqué au départ à des fins pacifiques, mais pour prévoir la répartition des ondes de chocs produites par l’explosion des premières bombes nucléaires. La connaissance des mécanismes de régulation climatique nous est donc venue primitivement des travaux réalisés sur la maîtrise militaire de l’atome. » Le film d’animation expose également la façon dont les architectes et urbanistes se sont emparés de l’imaginaire cybernéticien pour imaginer des villes en relation osmotique avec le vivant. Dans les années 60/70, dans le sillage des projets de ville-continent de Yona Friedman ou des projets de villes mobiles de Ron Herron (membre du groupe Archigram), les ambitions semblent encore radicales et démesurées. Mais on s’aperçoit aujourd’hui que ces projets un peu fous ont inspiré des démarches contemporaines d’écoconception ou des mouvements architecturaux – comme l’architecture morphogénétique, avec ses bâtiments d’apparence biologique, pensés par des architectes comme Achim Menges – qui se réalisent concrètement.

Alors utopie ? Ou dystopie ? Même si Donatien Aubert a beau dire que « le futur des sociétés humaines n’est pas écrit », son regard critique sur les imaginaires d’inspiration science-fictionnelle des figures de la haute technologie actuelle de la Silicon Valley que sont Jeff Bezos, Elon Musk ou Mark Zuckerberg nous appâtent évidemment à l’annonce de sa participation au week-end thématique Blade Runner, les 27 et 28 novembre, toujours au Centquatre. Il y interviendra sur deux tables rondes : « Hybridité : étude des dispositifs narratifs et visuels des films Blade Runner », où il discutera de l’apport esthétique de Douglas Trumbull, le designer des effets spéciaux du film de 1982, et sur comment ses choix ont orienté plus généralement les codes visuels du « tech-noir » ; et « La transformation des corps, des conduites et de l’environnement, au prisme de la cybernétique et de la géoingénierie », où il parlera êtres artificiels, automatisation des conduites et colonisation spatiale. « Notre réalité n’est peut-être pas aussi ductile que celle de l’univers de Philip K. Dick ou du film de Ridley Scott, mais Blade Runner a cependant admirablement anticipé certaines réalités contemporaines », reconnaît Donatien Aubert. « Les vues de Los Angeles dissoutes dans d’épaisses fumerolles ne sont pas sans rappeler l’apparence apocalyptique de certaines mégalopoles aujourd’hui, lors de pics de pollution. Et puis, en mettant en doute la réalité du libre arbitre, en jugeant sa compréhension inutile pour permettre la description de la conscience, le cadre d’interprétation mécaniste fourni par les cybernéticiens ne nous a-t-il déjà pas rendus assimilables à des machines ? Saurons-nous déjouer ces dangereuses simplifications ? »
Dans le cadre de la Biennale internationale des arts numériques Nemo de la région d’Ile-de-France
–Week-end « Blade Runner » les samedi 27 et dimanche 28 novembre au CentQuatre : Conférences et tables rondes, documentaires, VR et nouveau concert audiovisuel de Franck Vigroux et Antoine Schmitten avant-première. Parmi les sujets abordés : l’esthétique de l’artificiel, les descendants de Blade Runner, son influence sur le théâtre, la bande dessinée, le cyberpunk, le jeu vidéo, la cybernétique, l’urbanisme, le transhumanisme… Et bien sûr, l’empathie, cette émotion invisible de plus en plus difficile à discerner, alors qu’elle est censée différencier l’humain de l’androïde.
– Exposition « Au-delà du réel » jusqu’au 2 janvier au CentQuatre ( cf « Vers une perception au-delà du réel? », Intramuros 209)

Jusqu’au 6 mars 2022, « Here We Are ! Les femmes dans le design de 1900 à aujourd’hui » honore les figures féminines qui ont marqué le monde du design.
Que ce soit au sein de la mode, du design de meubles, de l’industrie ou de l’aménagement d’intérieur, nombreuses sont les femmes qui ont apporté une touche cruciale au développement du design moderne. Comme un écho aux interrogations sur la place de la femme dans la société, le Vitra Design Museum de Weil am Rein en Allemagne leur dédie une exposition où près de 85 designeuses sont représentées.

© Christoph Sagel © VG Bild-Kunst, 2021
Une exposition chronologique sur 120 ans
Très didactique, l’exposition est divisée en quatre parties chronologiques. La première, qui démarre au début des années 1900, retrace l’histoire du design en Europe et aux Etats-Unis. Une période d’autant plus importante puisqu’elle rime avec reconnaissance de la profession en tant que telle. La deuxième partie s’étend de 1920 à 1950 et présente des figures marquantes de l’époque telles que la Française Charlotte Perriand, l’Irlandaise Eileen Gray ou encore la Cubaine Clara Porset. La troisième partie de l’exposition, étalée de 1950 à 1980, met en avant l’émergence d’une vague de figures féminines et féministes en totale opposition avec la mentalité conservatrice de l’après-guerre. La quatrième et dernière partie se concentre sur le design d’aujourd’hui et ses pionnières dont Matali Crasset, Hella Jongerius ou Patricia Urquiola sont quelques exemples. Plus spécifiquement, certaines femmes designers n’hésitent pas à repousser les limites pour se réinventer au sein de la discipline. Citons par exemple Julia Lohmann qui s’est affranchie d’un nouveau matériau durable et peu exploité : les algues marines, ou Christien Meindertsma dont l’approche unique s’intéresse aux processus de production et cherche à comprendre en profondeur les matériaux et les produits qui l’entourent.
Une exposition enrichissante et complète qui permet d’attribuer la place méritée à ces femmes qui ont contribué à l’évolution du design tel qu’il est aujourd’hui.

© Christoph Sagel © VG Bild-Kunst, Bonn 2021

© Christoph Sagel © VG Bild-Kunst, Bonn 2021
Le Vitra Schaudepot comme laboratoire
En parallèle, le Vitra Schaudepot, qui abrite près de 400 œuvres du musée, en a aussi profité pour se pencher sur les designeuses, en se basant toutefois sur un thème plus précis ; dévoilé en juin 2021, « Spot On : Les femmes designers dans la collection » s’intéresse au rôle des femmes dans le design de meubles. De nouvelles pièces inédites d’Inga Sempé, Zaha Hadid ou encore Gunjan Göttering y sont exposées tandis que des objets provenant des archives du musée, permettent en même temps d’illustrer le rôle des femmes dans la création de meubles.

© Christoph Sagel

© Christoph Sagel © VG Bild-Kunst, Bonn 2021