Biennale de Saint-Etienne : le design en questions
Biennale de Saint-Etienne Autofiction ©Seghir Zouaoui- -mi

Biennale de Saint-Etienne : le design en questions

Selon Olivier Peyricot, cette édition de la Biennale de Design présente un « design modeste, pas de grands gestes », et donne des pistes, des outils, pour alimenter le débat sur les grands enjeux actuels : l’environnement, la production, la mobilité et  la façon d’habiter. En prenant pour thème « Bifurcation(s) », la manifestation dresse un constat sans appel – nous sommes à un tournant où il est urgent d’agir – et positionne les designers comme des acteurs essentiels des mutations à l’œuvre. À noter, que pour la première fois, la Biennale durera 4 mois, jusqu’au 31 juillet.


« Ici vous ne trouverez pas de solutions, mais de quoi vous interroger et débattre » : c’est en substance le credo d’Olivier Peyricot, directeur scientifique de la 12e Biennale Internationale Design Saint-Etienne, lorsqu’il présente cette édition.

Et c’est peu dire : dans l’ensemble du parcours des expositions proposées à la Cité du design jusqu’au 31 juillet, les thématiques rivalisent de questionnements, pour peu que le visiteur prenne le temps de se plonger dans les nombreuses explications inscrites sur les cartels.

Biomimétisme, nouvelles mobilités, radioscopie de nos vies domestiques, modes de production… toutes les expositions expriment une expérience ou une nécessité de « bifurcation (s) » qu’elle soit «subie ou choisie » comme l’exprime Thierry Mandon, directeur général de la Cité du design.

Une affirmation de l’événement comme une laboratoire de recherches, renforcée par les nombreux work in progress et conférences qui auront lieu tout au long de ces quatre mois sur les différentes sites. En effet, si l’on a connu dans la dernière décennie de biennales portées par des commissaires inspirants,  à la ligne artistique radicale ou quasi philosophique  – on se souvient par exemple de l’édition autour de la « Beauté » portée par Benjamin Loyauté en 2015 –,  depuis deux ou trois éditions, la Biennale  vient nourrir des réflexions plus sociétales – à l’image de la très dense édition « Working promesses » en  2017. L’événement international affirme ainsi un positionnement fort du design au cœur des sciences humaines, comme un outil d’exploration et d’expérimentations pour accompagner les mutations.

Ainsi, si les expositions comportent dans l’ensemble une grande présentation de design produit, elles ouvrent aussi le rôle du designer comme concepteur de processus, de services, en réponse à des usages, des évolutions nécessaires, des comportements, et des questions économiques. Le design est stratégique, artistique, et politique, dans le sens « au service de la cité ».

Biennale de Saint-Etienne ''Singulier Plurielles'' ©Seghir Zouaoui

Récits et recherche à la Cité du design

Parmi les expositions qui viennent appuyer ce positionnement, on citera la passionnante « Autofiction, une biographie de l’automobile »,  Olivier Peyricot et Anne Chaniolleau abordent le design automobile d’un point de vue avant tout anthropologique, en interrogeant les imaginaires générés et les codes d’appropriation. Le récit proposé n’en oublie pas l’éternelle question de la ressource et des matériaux, les recherches en design de ce « phénix technologique qui ne cesse de renaître », avec ses espoirs et tâtonnements, notamment autour de l’échec de la voiture dite « autonome ».

Autre signe des temps, c’est un continent entier – et non plus une ville ou un pays, comme ce le fut avec Detroit pour l’édition de 2017 ou la Chine en 2019 – qui est à l’honneur, à travers l’exposition «Singulier plurielles » de Franck Houndégla. Entre design graphique, macro-systèmes et micro-systèmes, l’exposition explore d’autres façons de concevoir, de produire et d’habiter. « Ce sont des projets nés de concepteurs divers, mais qui dans leur démarches partagent les modalités du design » souligne le commissaire. Designers, makers, architectes, ingénieurs, inventent, transposent des process, détournent des objets, des services pour le collectif. Cela va du créateur d’effets spéciaux qui transpose ses compétences pour la réalisation de prothèses, l’association d’un bijou connecté à une plateforme de données pour la mise en place d’un dispositif de e-santé, la construction d’automobile non standard répondant ainsi à une utilisation plurielle (confection textile, agriculture, hôtellerie…), l’utilisation de matériaux locaux pour l’architecture jusqu’à la recherche de « brique sans déchets »…

Enfin, parmi la dizaine d’expositions présentées sur le site de la Cité, on retiendra aussi la note de fraîcheur, d’optimisme, apportée par « Le Monde sinon rien » : un commissariat mené par Benjamin Graindorge, designer et enseignant à l’ENSADSE et la chercheuse Sophie Pène au Learning Planet Institut, qui part du postulat de la richesse des territoires de création de la jeunesse. Le pari est fait d’explorer sur dix ans les projets de diplômes d’étudiants d’un réseau d’établissements, et d’y déceler les germes d’un « New Bauhaus », autour  du « vivant ». Selon Sophie Pène, il s’agit de «  montrer la puissance de la création dans les moments de transition. On parle facilement d’innovations tech, mais peu d’habitudes, de comportements, de culture, de création. La deuxième idée est de montrer que la créativité de la jeunesse tire les transitions, est nécessaire, que le rapprochement entre les sciences et les arts, et les frontières poreuses qu’on peut mettre en place sont vraiment les conditions de l’émergence  de projets puissants. » L’exposition englobe ainsi dans le concept d’ « école de création »  les laboratoires scientifiques, les makers labs, les tiers-lieux, les écoles d’art et de design. À travers des projets très divers – d’objets musicaux pour autisme  à une distillerie pirate !– il s’agit surtout de montrer la fertilité des territoires d’exploration, leurs résonances, et surtout une énergie, un désir, et un pouvoir d’agir.

Des événements en ville et en périphérie

Sur le site de Firminy, l’église Saint-Pierre accueille une exploration de Döppel Studio autour du cabanon de Le Corbusier : autour de 6 prototypes, disséminés dans le lieu, le duo de designers imagine des micro-architectures à poser dans un champ, pour se détendre, se reposer,  partager des moments de pause  dans une utilisation nouvelle des parcelles en jachère avec des constructions facilement déplaçables et exploitant un autre rapport au paysage.

Au cœur de la ville, le musée d’art et d’industrie propose pour sa part une habile mise en situation d’oeuvres contemporaines d’artistes en résidence au Creux de l’enfer. On retiendra par exemple l’installation au milieu des armes de l’œuvre de Vivien Roubaud, qui fige dans du verre des explosions, comme un arrêt sur image hors du temps.

Enfin, parmi les nombreuses autres événements,  le collectif Fil Utile composé de 17 membres dont la designeuse textile Jeanne Goutelle propose au sein de l’ancienne école des Beaux-Arts,« Relier-délier ».  Cette exposition met en scène des installations de créateurs mis au défi d’intégrer un nouveau matériau à leur savoir-faire. Se répondent des installations étonnantes, depuis la délicate association du ruban et de la porcelaine à des « graphiques en laine» réalisés à la main, donnant sous cet aspect doux et lumineux, une vision assez glaçante de l’industrie textile.

Englobant plus de 200 événements diversifiés autour de 7 expositions majeures, la Biennale de design cherche à toucher tous les publics. Bien sûr, on rêverait d’avoir une grande rétrospective exposée – à l’image par exemple de la didactique «Designers du design»  à Lille Capitale du design en 2020–, mais au sortir des expositions, il reste une telle impression d’effervescence de recherches, de bouillonnement créatif, de pistes explorées, que l’on pressent un avenir inventif, avec des solutions à portée de mains. Et sans pour autant en dresser un état des lieux bien clair, on ressent combien le secteur du design a un rôle décisif à jouer dans la transformation de notre monde. Pour peu qu’on le reconnaisse et lui donne les moyens de nous aider à prendre la bonne bifurcation.

La Biennale de design de Saint-Etienne en quelques chiffres

> 4 mois d’ouverture

> 48 installations

> 7 expositions sur le site Cité du design

> Plus de 235 designers représentés

> 222 événements sur la métropole stéphanoise

> 24 colloques et conférences

Rédigé par 
Nathalie Degardin

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12/6/2025
L’ombrière photovoltaïque : quand l’architecture produit de l’énergie

À l’heure de la transition énergétique, l’architecture ne peut plus se contenter d’être esthétique ou fonctionnelle : elle doit devenir active. Produire de l’énergie renouvelable, optimiser chaque surface, réduire l’empreinte carbone… autant d’objectifs qui redessinent les contours de la construction contemporaine. Dans ce contexte, l’ombrière photovoltaïque s’impose comme une solution aussi ingénieuse que polyvalente, à la croisée du design, de la performance et de l’engagement environnemental.

Longtemps cantonnée au confort et à la forme, l’architecture est désormais un levier stratégique de la décarbonation. Les bâtiments ne sont plus de simples consommateurs d’énergie : ils deviennent producteurs. Toitures solaires, façades intelligentes, géothermie intégrée… Parmi ces dispositifs, l’ombrière photovoltaïque s’illustre par sa capacité à conjuguer fonction, efficacité et intégration paysagère.

L’ombrière photovoltaïque : de l’ombre… à l’énergie

Derrière sa silhouette discrète, l’ombrière solaire remplit deux fonctions essentielles. Dans un premier temps, elle permets de protéger les espaces publics ou privés des intempéries, du soleil, de la chaleur puis dans un second temps elle aide à produire localement de l’électricité verte, grâce à des panneaux photovoltaïques installés en toiture. Installée au-dessus de parkings, zones piétonnes, aires logistiques ou campus d’entreprises, cette structure transforme des surfaces déjà artificialisées en producteurs d’énergie renouvelable — sans emprise supplémentaire au sol.

Pourquoi intégrer une ombrière solaire dans un projet ?

En zone urbaine dense, chaque mètre carré compte. Les ombrières permettent de rentabiliser les parkings et autres espaces ouverts en leur ajoutant une fonction énergétique. Produire sur site, c’est consommer moins d’énergie fossile. Ces structures participent ainsi à l’atteinte des objectifs des bâtiments BEPOS (bâtiment à énergie positive) et aux certifications environnementales (HQE, BREEAM, LEED…). Aussi, les bénéfices d’usage sont réels : réduction de l’effet d’îlot de chaleur, protection contre la pluie ou les fortes chaleurs, meilleur confort pour les usagers et les véhicules stationnés. Et pour les collectivités comme pour les entreprises, une ombrière photovoltaïque affiche un engagement environnemental clair, en phase avec les attentes des citoyens, collaborateurs ou clients.

Entre contraintes et opportunités : une solution flexible

Les ombrières s’adaptent à une grande variété de sites : parkings de supermarchés, plateformes logistiques, zones industrielles, aires de covoiturage, équipements publics… Mais attention, certains sites classés (ICPE, Seveso) peuvent nécessiter une analyse réglementaire approfondie. D’où l’importance de s’entourer d’experts capables d’intégrer ces structures dans des environnements complexes, sans fausse note.

L’ombrière devient un objet d’architecture

Longtemps perçues comme purement techniques, les ombrières solaires deviennent aujourd’hui des éléments architecturaux à part entière. Les architectes s’approprient ce nouvel outil et le déclinent en structures courbes, linéaires ou modulaires, en matériaux durables ou nobles, e, hauteurs et inclinaisons étudiées pour maximiser l’ensoleillement et en éclairages intégrés, pour transformer l’espace même de nuit pour un résultat qui offre une esthétique contemporaine, parfois spectaculaire et qui valorise autant le site que son usage.

Une dynamique soutenue par la loi

Depuis 2023, la loi française impose l’installation de panneaux photovoltaïques sur les parkings extérieurs de plus de 1500 m². Cette réglementation accélère l’implantation de ces structures et crée de nouvelles opportunités pour les architectes et maîtres d’ouvrage. De nombreuses aides, incitations et appels à projets viennent ainsi soutenir cette transition.

De fait, l’ombrière photovoltaïque est bien plus qu’un accessoire : elle est le symbole d’une architecture en mouvement, engagée, performante, et prête à relever les défis climatiques. Elle produit, protège, structure l’espace… et incarne cette nouvelle approche où chaque surface compte, où chaque projet devient l’occasion d’innover au service d’un avenir plus durable.

Plus d'informations : https://www.cimaise.fr/contraintes-site-icpe-seveso-ombriere-photovoltaique/

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12/6/2025
Tube solaires : une solution contemporaine, durable et bénéfique pour une lumière naturelle

À l’heure où le confort de vie se conjugue avec sobriété énergétique, les solutions d’éclairage naturel ont le vent en poupe. Parmi elles, les tubes solaires – aussi appelés puits de lumière – s’imposent comme une alternative ingénieuse, écologique et accessible pour illuminer les zones sombres de nos intérieurs. Bien plus qu’un dispositif technique, ils participent activement à notre bien-être physique et mental. Zoom sur un système discret qui transforme les pièces… et le quotidien.

Le fonctionnement du tube solaire est aussi malin qu’efficace : il capte la lumière extérieure et la redirige à l’intérieur via un conduit ultra-réflecteur. Il se compose de trois éléments clés pour permettre même aux pièces sans fenêtres de profiter d’un éclairage naturel généreux, à toute heure du jour.

  • Un dôme extérieur, posé sur le toit, capte les rayons du soleil.
  • Un tube réfléchissant, souvent en aluminium poli, guide la lumière à travers les combles ou les plafonds.
  • Un diffuseur intérieur, fixé au plafond, restitue une lumière douce et homogène, sans éblouissement.

Les bienfaits de la lumière naturelle

Une meilleure humeur au quotidien

Exposés à la lumière du jour, notre cerveau libère plus de sérotonine, l’hormone de la bonne humeur. Les espaces baignés de lumière naturelle favorisent la détente, diminuent le stress, et créent une atmosphère apaisante.

Un rythme de vie plus sain

La lumière joue un rôle clé dans la régulation de notre horloge biologique. Installer un puits de lumière dans un couloir ou une cage d’escalier permet de respecter davantage les cycles naturels du jour et de la nuit — avec à la clé, un meilleur sommeil.

Un coup de boost pour la concentration

Moins de fatigue visuelle, plus de clarté : la lumière naturelle améliore la concentration, la productivité, et limite le recours à l’éclairage artificiel dans la journée. Un vrai plus pour le télétravail ou les espaces de travail.

Une solution durable et économique

Zéro énergie consommée

Les tubes solaires fonctionnent sans électricité. Une fois installés, ils éclairent gratuitement, à la seule force du soleil.

Des économies sur la facture d’électricité

En réduisant l’usage des lampes, notamment en journée, les tubes solaires participent à la baisse de la consommation énergétique. Une démarche à la fois responsable… et rentable.

Une durabilité à toute épreuve

Leur conception robuste garantit des performances durables, sans perte d’efficacité. C’est un investissement à long terme, sans mauvaises surprises.

Un confort thermique préservé

Contrairement à une fenêtre classique, le tube solaire laisse entrer la lumière… sans la chaleur. Ainsi, aucune surchauffe n’a lieu puisque la lumière est transportée par réflexion et non pas par conduction thermique. L’isolation est optimale, puisque le système est parfaitement étanche, sans fuite d’air ni pont thermique. Enfin, les tubes solaires sont compatibles avec les maisons passives : il respecte les normes des bâtiments basse consommation.

Sans entretien, sans contraintes

En plus de ses qualités thermiques, l’un des autres atouts majeurs du tube solaire réside dans sa simplicité puisqu’il n’a aucun moteur, volet ou pièce mécanique à entretenir. Il n’y a également pas de vitre à nettoyer puisque le dôme extérieur est autonettoyant grâce à la pluie et le conduit fermé empêche poussières et insectes d’entrer.

Une installation rapide, un rendu discret

Compact et adaptable, le puits de lumière s’intègre à presque toutes les configurations de toiture – tuiles, ardoises, ou toit plat. Il se pose très facilement en seulement quelques heures, sans avoir besoin de modifier la structure du toit et son esthétique soignée permet au diffuseur de se fondre naturellement dans tout type d’intérieur. Le puit de lumière peut être installée dans toutes les espaces qui manquent d’ouverture vers l’extérieur, tels que les couloirs, escaliers, salle de bain sans fenêtre, dressings, entrées ou halls, cuisines centrales ou bureaux.

Finalement, les tubes solaires apportent bien plus qu’un éclairage d’appoint : ils reconnectent les espaces à la lumière naturelle, améliorent la qualité de vie, tout en réduisant la consommation énergétique. Un petit geste pour la planète, un grand pas pour votre confort.

Plus d'informations : https://www.doinglight.fr/

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13/6/2025
IM MEN d’Issey Miyake présente “DANCING TEXTURE” à Paris

La marque de mode masculine IM MEN, lancée en 2021, présente une nouvelle exposition intitulée “DANCING TEXTURE”, du 28 juin au 1er juillet 2025 à Paris.

Déjà mise en lumière lors d’une première exposition en janvier dernier, IM MEN poursuit son exploration créative avec ce nouveau rendez-vous, organisé à l’occasion de la Paris Fashion Week et de la présentation de sa deuxième collection.

La marque s’inspire du concept « a piece of cloth », avec une approche conceptuelle et un sens de l’innovation textile. La collection Printemps-Été 2026, intitulée “DANCING TEXTURE”, illustre cette vision en associant design, ingénierie et mouvement, dans une approche à la fois poétique et technique du vêtement.

Un hommage vibrant à l’héritage du créateur et à la liberté des corps en mouvement — à découvrir au 38 rue du Mont Thabor, Paris 1er, du 28 juin au 1er juillet 2025.

Entrée libre sur réservation, dans un lieu en plein cœur de Paris, pensé comme une parenthèse inspirante entre deux défilés.

Rendez-vous ici pour réserver votre créneau.

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6/6/2025
Laurids Gallée, la passion du faire

Designer autrichien installé aux Pays-Bas, Laurids Gallée mêle à la fois l’art et le design dans sa pratique. Une double facette qu’il ne souhaite pas différencier, car elle est partie prenante de sa réflexion.

Il est de ces designers qui n’avaient pas prévu d’en devenir un. Élevé dans une famille d’artistes, de ses parents à ses grands-parents jusqu’à ses oncles et ses tantes, Laurids Gallée avait toujours renié toute forme d’expression artistique jusqu’à son entrée dans l’âge adulte. Le déclic a lieu au début de ses études d’anthropologie à Vienne, moment durant lequel il s’est rendu compte qu’il lui manquait quelque chose. « Je n’avais jamais pratiqué d’art auparavant, mais le design était celui qui me semblait être le plus élégant et évident, car il y avait des questionnements autour de la façon dont sont faites les choses et des pensées qui amènent à rendre un objet réel. » Refusé par les écoles d’art viennoises, il est contacté par son oncle, alors résident aux Pays-Bas et dont le voisin n’était autre que Joris Laarman, qui le convainc de faire la demande pour entrer à la Design Academy d’Eindhoven, dont il est finalement diplômé en 2015.

Studio de Laurids Gallée © Titia Hahne

Un studio à la croisée de l’art et du design

À sa sortie d’école, il travaille quelques années en conception de produits dans différents studios, tout en commençant à élaborer son propre univers artistique en parallèle, avant de se lancer à plein temps, en 2020. Un studio dont la pratique oscille entre procédés artistiques et prouesses techniques. « Bien qu’il puisse exister une frontière entre l’art et le design, j’aime croiser les deux. Dans mon travail, il y a différentes formes de langage avec la peinture et l’art d’un côté et un aspect beaucoup plus technique de l’autre, basé sur le savoir-faire des matériaux. C’est un peu contradictoire, mais j’aime voir comment ces deux mondes se lient entre eux. » Ainsi, son catalogue comprend à la fois des pièces en bois aux détails très artistiques comme le banc Fireworks à l’allure très esthétique ou encore le fauteuil Fever Dreams, et des pièces beaucoup plus techniques retrouvées dans ses objets en résine, comme le montrent le luminaire Empyrean et la table basse Metropolis.

Luminaire Empyrean © Mathijs Labadie

La recherche de l’objet parfait

Quand on lui demande s’il a un projet favori, la réponse de Laurids Gallée reflète en fin de compte sa pensée globale. Quelque peu perfectionniste, il confie que son objet préféré est celui qu’il n’a pas encore créé. « Chaque projet est une nouvelle façon d’essayer, de changer ou de faire mieux par rapport à la fois précédente. Je ne me dis jamais qu’un produit est parfait, je trouve toujours des défauts que je pourrai rectifier la prochaine fois. Mon prochain projet est donc toujours celui qui me plaira le plus. » Un processus de création fortement basé sur l’expérimentation, donc, qu’il voit plus comme une réponse à différents questionnements, résolus à travers la création de tel ou tel objet, comme il peut notamment le faire avec la résine, qu’il prend plaisir à voir évoluer. « J’aime penser des choses qui n’ont pas encore été faites et être complètement indépendant du reste des personnes qui travaillent ce matériau. Je suis souvent en territoire inconnu, mais c’est ce qui m’anime. »

Fauteuil Fever Dreams © Mathijs Labadie

Créer avec pertinence

Qu’il s’agisse d’une table, d’un luminaire, du bois ou de la résine, le processus de création de Laurids Gallée passe avant tout par sa volonté de faire des choses pertinentes. Quant à son inspiration, elle vient au gré de ce qu’il vit au jour le jour, mais également de techniques artistiques provenant du passé, dont il s’inspire dans beaucoup de cas, notamment pour son travail du bois. « Je n’ai jamais vraiment eu à chercher d’idées, car elles viennent à moi selon ce que je vais voir d’intéressant. C’est une bénédiction dans un sens, car je ne suis jamais en manque d’idées, mais ça peut aussi être une malédiction, dans le sens où je ne peux pas toutes les réaliser. »

Table d'appoint Metropolis © Mathijs Labadie

Adepte du faire, et se considérant comme un fabricant, il a pendant longtemps tout fabriqué lui-même. Aujourd’hui, à l’exception des pièces en résine pour lesquelles il s’accompagne d’une entreprise extérieure, tous les objets sont toujours conçus au sein de son studio, avec une équipe qui lui prête mainforte. Et si beaucoup de ses objets sont en bois ou en résine, il ne veut pour autant pas se restreindre à un type de matériau en particulier, considérant que l’important réside dans l’objet plus que dans la matière avec laquelle il est fabriqué. « Selon moi, c’est l’idée qui prime plus que le matériau lui-même. On peut concevoir un bon produit à partir de déchets, si c’est bien pensé et bien réalisé, ça peut donner un super résultat. Je pense que ce qui compte vraiment, c’est ce que tu fais et non avec quoi tu le fais. »

Banc Tralucid © Mathijs Labadie

Updates 2025

En février dernier, il présentait, dans le cadre de la Biennale de design de Rotterdam et en collaboration avec la galerie Collectional, la série Cairn. Une collection composée de six pièces, inspirées de la pratique ancienne de l'empilage de pierres et de galets d'empiler des pierres et des cailloux, et dont chacune d’entre elle se révèle comme une étude de sa propre matérialité. Lors de la Design Week de Milan, le designer a participé à l’exposition « Bamboo Encounters »de Gucci. Il dévoilait également avec JOV une collection de tapis en laine et soie, inspirées des nuages et fabriquées à la main. En parallèle, il a également pris part à l’exposition collective « The Theatre of Things » avec la galerie Delvis (Un)limited, devenue le théâtre d’une performance spontanée de designers. En juin, lors des 3daysofdesign, il présentera le résultat de son projet de résidence Materia, exposé à la galerie Tableau à Copenhague.

Série Cairn, exposée à la galerie Collectional à Rotterdam © Mathijs Labadie
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